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Le résultat des élections donnait définitivement tort à M. Gladstone. Non-seulement presque tous les dissidens du parti libéral étaient réélus, mais les tories gagnaient près de soixante-dix sièges à cette protestation soulevée dans tout le pays contre des projets pouvant aboutir à un démembrement de l’empire.

Les chiffres exacts étaient : conservateurs, 316 ; libéraux unionistes (des deux nuances), 73 ; gladstoniens, 194; parnellistes, 85. Le bataillon des autonomistes revenait aussi compact qu’au mois de décembre de l’année précédente, à deux sièges près, enlevés, l’un (Londonderry) à M. Justin Mac Carthy, par un conservateur ; l’autre (Tyrone) par un unioniste à M. O’Brien, éditeur de l’organe parnelliste, United Ireland. Malgré le triomphe personnel des autonomistes sur leur propre terrain en Irlande, la cause du home rule était enveloppée dans la défaite décisive de M. Gladstone, non seulement parce que les projets de ce dernier étaient condamnés sans appel, au moins pour quelque temps, mais parce que M. Parnell ne pouvait plus prétendre au rôle d Warwick parlementaire et tenir comme naguère la balance entre les deux partis. Il était rivé à l’alliance de M. Gladstone, et, même réunies, leurs forces (85 et 194) ne constituaient qu’une minorité en face de la grande armée conservatrice. L’adjonction des 73 libéraux dissidens, ou seulement de 30 à 40 d’entre eux, pourrait seule rendre à M. Gladstone une majorité dans ce parlement. Mais quelle apparence, après un vote comme celui du 7 juin et les incidens de la dernière campagne électorale, qu’une telle évolution pût se produire, au moins immédiatement? La balance du pouvoir appartenait désormais aux libéraux dissidens (whigs et radicaux), et M. Chamberlain avait raison en déclarant que les vrais vainqueurs dans les élections étaient les unionistes, bien que, des quatre partis dont. allait se composer le parlement (conservateurs, gladstoniens, parnellistes, unionistes), ce dernier fût justement le moins nombreux.