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apprendraient que, dans certains départemens, la moyenne des centimes additionnels est supérieure à 100, c’est-à-dire que les charges communales y sont doublées par les dépenses extraordinaires ou le service des emprunts communaux. La Savoie, la Haute-Savoie, le Nord, Seine-et-Oise, etc., sont dans ce cas. La moyenne générale des centimes additionnels communaux est supérieure à 51. Cette progression des centimes additionnels représente un accroissement constant des charges des contribuables. Or, le gouvernement est incontestablement responsable de cette situation. Dans les derniers jours de septembre 1881, le ministre de l’instruction publique adressait aux préfets une circulaire à l’effet d’inviter ces fonctionnaires à exercer une pression sur un certain nombre de conseils municipaux. Il s’agissait de déterminer ces conseils à renoncer au système des locations : les préfets devaient leur faire reconnaître l’avantage de construire des bâtimens d’école dont la commune serait propriétaire, en leur faisant remarquer que la caisse des écoles était toute prête à leur avancer les fonds nécessaires et que l’état viendrait à leur aide par de larges subventions. L’intervention officieuse des préfets n’ayant pu déterminer beaucoup de conseils municipaux à entrer dans cette voie d’emprunts dispendieux, une loi du 18 mars 1883 a donné aux préfets le pouvoir de contraindre les communes à contracter des emprunts pour la construction des locaux scolaires, et d’inscrire d’office aux budgets communaux les sommes exigées par le service de ces emprunts. C’est ainsi qu’après avoir dépensé 669 millions pour les maisons d’école, après avoir augmenté de moitié le fardeau de leurs contributions, et après s’être endettées de plus d’un milliard, les communes se trouvent encore en face d’une dépense qui se chiffre par plusieurs centaines de millions.

Qui pourrait être surpris qu’un pays, dont les épargnes sont ainsi épuisées à mesure qu’elles se forment, ne puisse plus fournir à l’agriculture, au commerce et à l’industrie les capitaux qui pourraient seuls les vivifier, et qu’une langueur générale s’empare du corps social ?


CUCHEVAL-CLARIGNY.