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faisait un éloge enthousiaste de ce même fonds et le préconisait comme une des créations les plus méritoires du régime actuel !

Cependant, le rejet de l’amortissable, venant après l’adoption d’obligations trentenaires pour les avances à faire à la caisse des écoles, impliquait l’abandon définitif de ce fonds. L’amortissement allait-il donc disparaître complètement de notre système financier ? Les adversaires du gouvernement se faisaient, depuis longtemps, une arme de l’insuffisance du crédit de 100 millions affecté au remboursement des obligations sexennaires ; ils traitaient de vain simulacre une opération qui se réduisait à éteindre d’une main 100 millions de dettes lorsque, de l’autre main, on en contractait pour 150 ou 200 millions. Quand on leur présentait ces 100 millions comme la dotation future d’un amortissement de la dette ancienne, aussitôt après l’extinction des obligations en cours, ils répondaient que cette extinction reculait sans cesse et qu’elle était destinée à être retardée indéfiniment par des émissions nouvelles. Or ce crédit lui-même disparaissait du budget de 1887 et, avec lui, toute perspective d’une atténuation de la dette ancienne. On avait fait un mérite au régime actuel d’avoir, en créant l’amortissable, assuré l’extinction graduelle de chacun de ses emprunts : maintenant, on venait déclarer que l’adoption de ce fonds avait été onéreuse pour le trésor et préjudiciable au marché des fonds publics, et on revenait aux emprunts en rentes perpétuelles. En dehors des trois emprunts contractés en amortissable, il ne subsisterait donc plus aucun vestige d’amortissement ; un complet démenti serait ainsi donné à tous les rapporteurs du budget et à tous les orateurs qui avaient célébré la persévérance avec laquelle ce crédit de 100 millions avait été maintenu. Comment répondre à l’opposition quand elle reprocherait au gouvernement de pousser à l’accroissement indéfini de la dette et de sacrifier l’avenir aux exigences électorales du présent ?

Pour aller au-devant de ce reproche, qui fut effectivement formulé, au sein du sénat, par les orateurs de la droite, on conçut la pensée de revenir à l’ancien usage qui attachait à tout emprunt un amortissement déterminé. La commission s’était contentée de la promesse faite par le gouvernement « d’inscrire au budget de 1887 une dotation qui amortirait la somme à émettre en 3 pour 100 perpétuel dans un délai égal à celui dans lequel se trouverait amortie la même somme empruntée en 3 pour 100 amortissable ; » c’est-à-dire en soixante-dix ou soixante et onze ans. Cette promesse ne parut pas suffisante au groupe de la gauche radicale : un article additionnel fut présenté par M. Dreyfus en son nom et au nom d’un certain nombre de ses collègues ; il était ainsi conçu : « La loi de finances ouvrira à l’amortissement de la rente 3 pour 100