Page:Revue des Deux Mondes - 1886 - tome 77.djvu/470

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 septembre.

Des fêtes, des banquets accompagnés de discours, des grèves et des congrès ouvriers, des incidens pénibles pour le début des manœuvres militaires qui viennent de commencer, c’est l’histoire d’hier et d’aujourd’hui, l’histoire de ces dernières semaines.

Ce n’est point, certes, pour revenir plus qu’il ne faut sur ces fêtes d’il y a quelques jours, bien moins pour jeter l’ombre la plus légère sur ce qui était dû à un savant éminent, à un illustre vieillard qui est l’honneur de la France avec sa couronne d’années et de gloire. Celui-là reste à part dans sa pure renommée, à laquelle les bruyantes ovations n’ajoutent rien. Le digne M. Chevreul, après comme avant ces ovations, reste l’ancêtre des savans de l’Europe, le vieux maître des maîtres plus jeunes du jour, bien qu’il se plaise à s’appeler le doyen des étudians. Il a passé sa vie dans la paix sérieuse de l’étude, dans les expériences du laboratoire, dans toutes les recherches qui ont illustré son nom, agrandi la science, honoré et servi son pays. Par le plus heureux et le plus rare privilège, il a dépassé les limites de l’âge ordinaire ; il a atteint le siècle révolu, comme pour prouver à des générations agitées et surmenées que le travail régulier dans une vie bien conduite ne détruit pas les natures saines. On a fêté M. Chevreul pour sa centième année accomplie ; les plus sincères hommages étaient bien dus à cette longévité féconde d’un homme qui reste le doyen des savans de la France, de l’Europe et probablement du monde. Tout ce que peuvent se demander ceux qui mettent quelque délicatesse dans les témoignages de leur respect, c’est si on a donné la meilleure forme à ces légitimes hommages, si tant de fracas convenait à cette vieillesse