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à chaque matière un numéro d’ordre conforme au rang qu’elle occupait. Ceci posé, partons d’un élément quelconque, comptons-en six après lui et comparons le septième à celui qui nous a servi de point de départ, nous retrouvons en général un proche parent de ce dernier. L’oxygène nous conduit au soufre, le sodium au potassium, et ainsi de suite. M. Newland lui-même nous permet d’éclaircir un peu et de matérialiser cette notion, passablement vague et obscure, en assimilant les séries de corps simples aux notes successives d’une suite de gammes tempérées, notes correspondantes aux touches blanches d’un clavier de piano. Or si, pour fixer les idées, nous considérons un do et le carbone, nous aurions, en suivant l’ordre : , azote ; mi, oxygène ; fa, fluor ; sol, sodium ; la magnésium ; si, aluminium. La septième note, c’est-à-dire l’octave, sera encore un do (silicium), et nous serons revenus en quelque sorte à notre point de départ, puisque les notes suivantes reproduisent de nouvelles gammes, et ainsi de suite. Au surplus, la loi est absolue en acoustique, et en philosophie naturelle elle n’est qu’approchée et confuse. Non-seulement il est fréquent que « l’octave » de telle substance ne se rapproche de celle-ci que par un petit nombre seulement de caractères, mais il faut imaginer l’existence de quantité d’élémens hypothétiques destinés à combler des lacunes béantes. Toutefois, la découverte du gallium par M. Lecoq de Boisbaudran, et celle plus récente du scandium, due à MM. Nilson et Pettersson, ont plutôt contribué à fortifier la théorie qu’à la battre en brèche, puisque ces nouveaux métaux sont venus tort à propos occuper des places vides. Si M. Newland a signalé encore bien des coïncidences, la plupart de ces rencontres, de son propre aveu, sont purement fortuites. Qui veut trop prouver ne prouve rien. Un de ses collègues lui a même demandé, sous forme de plaisanterie, s’il n’avait remarqué aucune loi périodique dans les lettres composant les noms des élémens.

Plus générales encore que les théories de Newland, mais aussi moins concrètes et moins faciles à saisir, les conceptions de Mendeléjef et Lothar Meyer ont besoin, pour être expliquées et comprises, d’une sorte de représentation géométrique. Sur une droite indéfinie, à partir d’une origine fixe, portons des longueurs représentant les poids atomiques successifs, nous obtiendrons ainsi une série de points répondant chacun à un corps simple particulier. En tous ces points élevons des perpendiculaires ou ordonnées de longueurs proportionnelles aux « volumes atomiques : » on nomme ainsi le quotient du poids atomique par la densité de l’élément à l’état solide. Ainsi, pour le soufre, dont l’atome pèse 32 et dont la densité s’écarte peu de 2, le chiffre correspondant sera 32/2 ou 16, Réunissons enfin, par un trait continu, les diverses extrémités de