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sans doute à un total beaucoup plus considérable, s’il ajoutait les derniers venus aux corps simples connus avant 1860. C’est que les terres métalliques prétendues nouvelles, d’où l’on se flatte de réussir plus tard à dégager le futur élément se trouvent être des mélanges de substances déjà connues, mais mal étudiées ; d’autres fois les recherches subséquentes ne confirment pas les observations antérieures, ou même les infirment d’une manière absolue. On compte ainsi en chimie plusieurs enfans mort-nés, trop tôt baptisés, puis disparus, qui fournissent un ample sujet de travail aux chercheurs dont les efforts, parfois récompensés, peuvent aboutir à des résurrections inattendues. Peut-être bien qu’une fois arrivé au chiffre de cent six, il faudra renoncer à poursuivre plus loin : nous exposerons, en effet, plus tard, les théories de M. Newland, et les tables-claviers dressées par le savant anglais ne laissent place qu’à cent six termes. Quoi qu’il en soit, les corps simples qui, par eux-mêmes ou par leurs dérivés jouent un rôle considérable dans l’économie de la nature, dans l’usine de l’industriel ou dans l’officine du pharmacien, sont au nombre de trente-six[1].

Il est bon toutefois de faire observer que les composés ou les alliages dans lesquels figurent les autres matières élémentaires souvent ne sont ni très rares, ni absolument sans emploi. Le chimiste essayeur et l’agronome trouvent des réactifs fort utiles dans les sels d’urane et de molybdène ; allié à d’autres métaux, le palladium sert pour le plombage des dents ; certains minerais de fer sont fortement mélangés de titane et leur qualité n’en est que meilleure ; le platine est presque toujours allié à un peu d’iridium ; le lithium, dont l’analyse spectrale dévoile jusqu’à la moindre trace, sert de base au carbonate de lithine, un remède assez usuel. Si le glucinium est parfaitement inconnu en dehors des laboratoires de minéralogie, il n’en est pas de même de l’émeraude. Cette jolie gemme renferme de l’oxyde de glucinium, ou glucine, uni à la silice et à l’alumine ; mais si la pierre vert-pré cristallisée et limpide est chose rare et chère, le minéral opaque et à demi amorphe abonde dans certaines parties du terrain primitif, au point qu’on s’en sert, dit-on, pour paver les rues de Limoges.

Neuf des trente-six corps sont connus de temps immémorial. Il est à peine nécessaire d’expliquer que nous voulons parler du charbon et du soufre, ainsi que des sept métaux de l’antiquité et du moyen âge, chacun de ceux-ci étant associé à une planète et à un

  1. En voici la liste alphabétique : aluminium, antimoine, argent, arsenic, azote, baryum, bismuth, bore, brome, cadmium, calcium, carbone, chlore, chrome, cobalt, cuivre, étain, fer, fluor, hydrogène, iode, magnésium, manganèse, mercure, nickel, or, oxygène, phosphore, platine, plomb, potassium, silicium, sodium, soufre, strontium, zinc.