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que de pareils poids puissent être fixés solidement sur les murailles de ce gigantesque bâtiment de combat. Ils le sont cependant, mais on se dit qu’une autre solution interviendra et que cette lutte va prendre fin.

Substituer à cette protection écrasante qui semble faite pour entraîner au fond de la mer celui qui l’accepte, la protection fournie par un corps si léger que lorsqu’il est à l’état libre, le moindre souffle le disperse et le fait voler en l’air, certes, c’est une opposition d’idées qui surprend d’abord et qui déconcerte. Et, cependant, si l’on considère ces deux modes de protection en vue de l’objet essentiel, qui est de ne pas couler, celui-ci est certain et celui-là est précaire. Le premier moyen de défense repose sur la résistance aveugle qui dans une expérience récente a été brisée par un projectile en acier chromé traversant franchement une plaque de 0m, 40 et parcourant ensuite 600 mètres après cet exploit. Le second est fondé sur l’emploi combiné de l’élasticité et de la légèreté : l’élasticité qui se dérobe pour revenir, qui n’engage pas la lutte et qui fait que la barrière reprend sa place après que le projectile a passé ; la légèreté qui représente la place prise par un corps léger dont la présence forme ainsi un obstacle absolu à l’envahissement de l’eau.

L’idée d’encombrer le vide des corps flottans (et particulièrement des bâtimens de guerre) n’est pas nouvelle. A mesure que les cuirassés augmentaient de poids, la capacité du bâtiment qui devait les porter augmentait aussi et très rapidement par une loi inflexible, et cette espèce de guerre aux espaces vides s’accentuait et cherchait à se préciser, mais vainement. L’idée de l’obturation automatique, c’est-à-dire du trou se rebouchant de lui-même après le passage des projectiles, parut plus ambitieuse ; c’est à peine si on la voit se formuler.

Ce qui est véritablement nouveau, c’est la possession du corps capable de se plier à ces deux offices. La multiplicité et la continuité des recherches qui ont précédé son apparition montrent bien qu’elles correspondaient à un besoin impérieux.

La liste de ces essais est très longue.

Le vice-amiral Dupouy, alors capitaine de vaisseau, chercha la solution de l’encombrement dans une substance calcinée : bien des officiers peuvent se rappeler qu’à une certaine époque le yacht impérial l’Aigle fut transformé en un véritable laboratoire.

Un lieutenant de vaisseau en retraite, qui s’est adonné à des recherches savantes sur les questions maritimes, M. Labrousse, préconisa la zostère disposée en briques : c’était un varech comprimé.

Les Anglais et les Italiens recoururent au liège. L’Inflexible est