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apprentissage, se rendent utiles à eux-mêmes et à la société, dont ils avaient bien des chances de devenir le fléau. Le régime qui a été appliqué à cette colonie, et qui seul lui convient, est celui d’une direction attentive, bienveillante et ferme, et comme une paternité sévère. L’écueil serait dans un certain relâchement assez conforme aux idées du jour, ou dans un régime militaire à l’excès, qui agirait sur l’extérieur plus que sur le fond même, qu’il faut modifier avant tout. Il y a là des précédens et une tradition qui peuvent servir de règle à l’avenir.


III.

Pour donner une base à nos conclusions sur l’état économique de l’ensemble des régions qui composaient l’ancienne Touraine, le mieux est de l’observer dans ces circonscriptions qui, sous la dénomination administrative d’arrondissemens, ont conservé leur caractère bien distinct. La plus riche est celle à qui le chef-lieu a donné son nom et sert de centre. Constamment en rapport avec la campagne par la circulation des habitans comme par l’échange des denrées, nulle part le sol n’a plus de valeur que dans l’arrondissement de Tours ; nulle part l’industrie ne s’associe dans une mesure plus considérable à l’agriculture. De nombreux cours d’eau parcourent cette belle vallée, et l’Indre y fait mouvoir plusieurs usines, en même temps qu’elle contribue à lui donner sa physionomie et à lui communiquer un charme particulier. Balzac s’en est fait pour ainsi dire le poète dans les romans qu’il s’est plu à y placer comme dans un centre favori, et décrit cette douce rivière qui n’est ni trop large ni trop étroite, qui, profonde et pure, n’est bruyante qu’aux écluses et rapide qu’aux pieds des moulins, et qui serpente dans la prairie à l’ombre des bouquets d’arbres entre des collines couronnées de bois, de châteaux, et çà et là coupées de brèches où débouchent de champêtres vallons. La Loire, — le fleuve royal, comme on l’a plus d’une fois appelé, — le fleuve national, comme on peut le désigner plus historiquement, — parcourt avec sa majesté calme, quand elle n’en sort pas par de violentes inondations, une partie de l’arrondissement. Au sortir du département de Loir-et-Cher, elle nous apparaît à Amboise. C’est là que la Touraine commence à prendre son véritable aspect. Amboise est un de ces villages-villes dont abonde cette province. Après Blois, qui appartient à un autre département, on y rencontre le premier château qui se présente avec ses souvenirs historiques. Dans ce château d’Amboise, Charles VIII, échappé à la prison de Plessis-lès-Tours, n’eut que le temps de rêver des embellissemens qu’il laissait à d’autres