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des nobles de Sidon[1]. Il vend les chevaux qu’il tire de l’Egypte « à tous les rois des Hétéens et aux rois d’Aram. » Enfin, dans le second livre des Rois, il est raconté que les Syriens, pendant qu’ils assiégeaient la ville de Samarie, sous le règne de Joram, fils d’Achab, s’enfuirent précipitamment, frappés de panique, « parce que le Seigneur fit entendre dans le camp des Syriens un bruit de chars et un bruit de chevaux, le bruit d’une grande armée, et ils se dirent l’un à l’autre : « Voilà que le roi d’Israël a pris à sa solde contre nous les rois des Hétéens et le roi d’Egypte, afin qu’ils marchent contre nous[2] ! »

Il semble résulter de ce récit que la force des armées hétéennes, comme celle des armées de l’Egypte, consistait surtout en chariots de guerre et en chevaux ; ceci est tout à fait d’accord avec ce que l’Egypte nous apprend de cette même nation. C’est, en effet, à l’Egypte plutôt qu’à la Judée qu’il convient de demander des renseignemens détaillés et précis sur les vrais Hétéens, sur ceux du nord, que les Juifs n’ont guère aperçus que comme des ombres lointaines, dont la silhouette apparaissait et se dessinait par momens sur le ciel, à l’extrême limite de leur horizon. Jusqu’au jour où ont été connus et traduits les documens égyptiens, les passages de la Bible que nous avons cités avaient fort embarrassé les commentateurs ; ceux-ci n’en avaient, en général, pas saisi le sens ; surtout ils n’en avaient pas mesuré toute la portée.

C’est avec la dix-huitième dynastie de Manéthon que l’on commence à rencontrer, dans les chroniques murales de l’Egypte, le nom des Khiti. Jusqu’au règne de Ramsès III, ils y reparaîtront sans cesse, d’abord mêlés aux autres tribus du Routen ou de la Syrie, puis, un peu plus tard, figurant au premier plan, comme le plus belliqueux et le plus puissant des peuples qui disputent aux Pharaons la possession de cette contrée. Ils sont parfois désignés sous ce titre : « le vil ennemi de Cadech. » C’est le nom d’une ville dont l’existence même était ignorée avant les travaux de Champollion. Des textes égyptiens et des images qui les accompagnent dans les tableaux de bataille, il résulte clairement que cette forteresse barrait le passage aux envahisseurs dans la haute vallée de l’Oronte, qu’elle était située au sud d’Hamath, et que les eaux du fleuve l’entouraient de manière à ce qu’elle formât une ile ou une presqu’île.

  1. . I Rois, XI.
  2. II Rois, VII, 6.