Page:Revue des Deux Mondes - 1886 - tome 75.djvu/421

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’aucun navire ne visite, des voies ferrées dont le maigre trafic est presque, en entier détourné des lignes préexistantes. Si l’état enfin réduisait les cadres de son personnel, congédiait une partie de tous ces parasites, dont il multiplie sans cesse le nombre, il dégagerait une fraction du poids mort qui alourdit l’industrie française.

Un autre facteur qui pourrait intervenir et qui interviendra pour diminuer le prix de revient des produits, c’est la baisse du taux de l’intérêt et des profits du capital. Ici l’état n’a qu’à s’abstenir et à laisser faire. C’est une des tendances les plus certaines de notre temps que celle qui déprécie l’intérêt des capitaux et les bénéfices de l’industrie. Dans notre Essai sur la Répartition des richesses et la tendance à une moindre inégalité des conditions, nous avons décrit minutieusement les causes, la marche et les effets de ce grand phénomène social. Que les états restreignent leurs dépenses extraordinaires, qu’ils ne s’ingénient pas à dépenser des milliards, qu’ils laissent des sommes à la disposition de l’industrie et de l’agriculture, on verra la baisse du taux de l’intérêt s’accentuer graduellement ; on sera content d’un revenu de 3 pour 100 assuré, et les industriels et les commerçans se jugeront satisfaits quand ils obtiendront régulièrement 5 1/2 à 6 pour 100. Ici encore l’état s’est montré dans ces dernières années un élément perturbateur ; avec ses gros emprunts incessans, — nous parlons aussi bien de ses emprunts occultes que de ses emprunts publics, — il a contribué à ralentir la dépréciation de l’intérêt. Celle-ci amènera dans une certaine mesure une baisse du prix de revient des produits. Il est vrai qu’il faut un certain temps pour que les mœurs publiques se plient à un phénomène qui déprime la situation et resserre les perspectives de la classe supérieure de la société. Dans l’ouvrage que nous citions il y a un instant, nous croyons avoir prouvé que le monde marche, plus vite qu’on ne le pense, vers une moindre inégalité des conditions humaines. Les industriels et les commerçans devront se contenter de profits moindres ; il leur sera plus difficile d’arriver à de grandes fortunes ; ils devront prendre des habitudes plus modestes. Il en doit être de même dans l’exploitation du sol : on rejette sur la concurrence étrangère la responsabilité de la crise de la propriété rurale ; la cause principale en est ailleurs : il la faut chercher dans les habitudes de vie beaucoup trop large et trop oisive qu’avaient fini par prendre les fermiers, grisés par une prospérité trop soudaine, et aussi dans la rareté des ouvriers agricoles et les habitudes d’irrégularité, parfois d’insubordination, auxquelles peu à peu ils s’étaient laissé entraîner.

Pour, amener la baisse durable du prix de revient, on doit compter avec un troisième facteur, une amélioration dans la