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la période quinquennale suivante, elle s’est encore considérablement développée, et la moyenne annuelle y atteint 2,450,000 kilogrammes. Les chiffres des années récentes dépassent encore ce dernier. En 1881, on extrait des mines 2,592,000 kilogrammes d’argent, puis 2,769,000 en 1882 ; 2,895,000 en 1883 et enfin, 2,860,000 en 1884. L’apport annuel de ce métal a donc plus que triplé en vingt-cinq ans. Cet accroissement de production se maintient malgré une dépréciation de 22 pour 100 dans les prix, et rien n’indique que les mines doivent devenir moins puissantes. Dans le même laps de temps, la production de l’or suit une marche inverse ; au lieu de s’accroître, elle diminue, non pas dans des proportions considérables il est vrai, mais cependant d’une façon sensible. La moyenne annuelle de la production de l’or était de 197,515 kilogrammes dans la période 1851-55, et même de 206,000 kilogrammes dans la période 1856-60, ce qui représentait plus de 700 millions de francs d’or produits annuellement. L’extraction annuelle tombe à 172,000 kilogrammes de 1876 à 1880 ; puis, diminuant encore, elle n’est plus que de 158,000 kilogrammes en 1881 ; 146,000 kilogrammes en 1882 ; 143,540 en 1883, et enfin, 140,000 kilogrammes en 1884 : elle s’est ainsi réduite de 32 pour 100 environ en une trentaine d’années. Voilà donc deux métaux précieux auxquelles nos lois monétaires avaient assigné un certain rapport fixe de valeur, il y a quatre-vingts ans ; ce rapport se maintient à peu près jusqu’en 1870, non pas cependant sans certaines variations, mais elles étaient légères. Puis il arrive que la production de l’un de ces métaux, l’argent, fait plus que tripler, pendant que la production de l’autre, l’or, diminue d’un tiers ; est-il étonnant que, sur le marché libre des lingots, la valeur du premier de ces métaux ait fléchi relativement à celle du second ? Faut-il chercher ici des explications mystérieuses ou contingentes ? La raison principale ne ressort-elle pas des changemens dans l’importance de la production ? Autrefois, dans la période de 1851 à 1855, on produisait annuellement pour 688 millions de francs d’or environ contre 199 millions d’argent ; la valeur de l’or produit représentait 77 1/2 pour 100 de l’ensemble de la production des métaux précieux et la valeur de l’argent seulement 22 1/2 pour 100 ; en 1884, les proportions sont presque renversées, la valeur de l’or produit n’est plus que de 487 millions de francs et celle de l’argent s’élève à 642 millions de francs ; c’est l’or maintenant qui représente la moindre partie dans la production annuelle des métaux précieux, à savoir 43 pour 100 ; tandis que l’argent en forme la plus forte partie, soit près de 57 pour 100. Des modifications aussi profondes et aussi constantes ne peuvent aller sans un changement de valeur.