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les antiquités découvertes, mais seulement les plus caractéristiques ; ils sont accompagnés de cartes, de vues perspectives, de coupes et de plans. Si par un accident ses collections étaient détruites, ses livres en conserveraient du moins les images les plus importantes et les descriptions. Sa première publication des antiquités troyennes contenait, dans un gros atlas de photographies, presque tous les objets trouvés ; mais ces photographies étaient mauvaises, l’ensemble en était fort coûteux; il s’en tint donc à l’autre système, qui a été suivi dans le volume de Tirynthe,

Les fonds de ce riche Américain ont été appliqués en beaucoup d’endroits, à Ithaque, à Athènes, à Marathon, à Orchomène de Béotie, mais surtout à Troie, à Mycènes et à Tirynthe. A Marathon, il n’a rien trouvé. A Athènes, il a seulement démoli la tour florentine d’Acciaioli, qui couvrait l’aile droite des Propylées. Ithaque semble n’avoir conservé que de bien faibles traces de la légende d’Ulysse. Le déblaiement d’Orchomène n’a été que commencé. C’est donc à Troie, à Mycènes et à Tirynthe que ses grandes fouilles ont eu lieu. La Revue a rendu compte en leur temps des deux premières. Je rappellerai seulement que celles de Troie ont été plusieurs fois reprises et ont fourni de nouveaux et précieux documens. Les objets recueillis à Troie ne s’élèvent pas aujourd’hui à moins de vingt mille, dont les pesons de fuseau, plus ou moins ornés de gravures, forment le tiers. La masse de la collection troyenne est à Berlin, où elle figure sous le nom de musée Schliemann. Celle de Mycènes, ayant été tirée d’un sol appartenant à l’état grec, est restée à Athènes, conformément à la loi. C’est la plus riche des collections locales par la quantité de parures d’or dont les squelettes mycéniens étaient couverts. C’est celle-là surtout que les Turcs pilleront et détruiront s’il leur arrive un jour de reprendre Athènes.

Pour recueillir tant d’objets, précieux à plusieurs titres, et composer ces belles collections qui font faire un pas à la science, notre archéologue a toujours poussé ses explorations jusqu’au sol vierge. Il a rencontré la succession de couches signalée ci-dessus. Pour pénétrer à la seconde, il a dû enlever la première, puis la seconde pour atteindre la troisième, et ainsi de suite jusqu’au rocher. Il a donc beaucoup détruit. s’il n’avait laissé des massifs inexplorés et ce qu’en terme du métier on nomme des témoins, on ne voit pas ce qui aurait survécu de ces anciennes cités, sauf les petits murs des premiers habitans. Mais était-il possible d’agir autrement? Le lecteur jugera. Jusqu’aux temps helléniques et récens, les maisons étaient dépourvues de fondations solides ; on les élevait sur des décombres. Ce sol mouvant provenait des terrasses et des murs de