Page:Revue des Deux Mondes - 1886 - tome 74.djvu/86

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en vis, ils sondent facilement le sol et sentent le couvercle de pierre ; la pioche et la pelle font le reste. La Grèce, les îles, les côtes d’Asie, Rhodes, Chypre ont été, avant 1870, remuées et trop souvent ravagées, sous prétexte d’archéologie, par la passion du lucre.

La Société archéologique d’Athènes, voyant approcher l’ère des grands travaux, avait conçu le projet de déblayer la ville sainte de Delphes, déjà touchée par M. Wescher. Elle avait pour cela organisé une loterie; mais celle-ci n’avait pas eu le succès qu’on espérait et la Société dépensait petitement le revenu de la somme recueillie. Par le fait, en 1870, les grandes fouilles sur le sol grec n’étaient pas commencées.

Pendant les premières années de ma direction à l’École d’Athènes, je ne perdais aucune occasion de faire entendre au gouvernement impérial que la matière allait manquer à l’étude, que tous les faits visibles étaient maintenant connus, que les découvertes nouvelles étaient dues au hasard ou à des spéculateurs, et, dans tous les cas, très bornées. L’empire n’aimait pas beaucoup la Grèce ; il s’intéressait peu à ses antiquités ; sur la fin, il avait de grands besoins et n’était point disposé à faire des sacrifices pour un genre d’études dont il ne sentait pas l’importance. Cependant j’avais pu obtenir une très petite somme à prendre sur le reliquat du budget de l’École; avec ces 2,000 francs, MM. Gorceix et Mamet avaient commencé à déblayer des habitations préhistoriques à Santorin, l’ancienne Théra ; ils en avaient rapporté une collection de vases et d’autres objets du plus haut intérêt ; cette collection est conservée à l’École française. Mais nous étions alors si mal en fonds que, sur les 2,000 francs, ces messieurs avaient dû payer leur voyage, leur séjour et les indemnités aux propriétaires de vignes.

Le temps de la guerre fut perdu. Après la guerre, l’assemblée nationale, sur la proposition de M. Thiers et de M. Jules Simon, alors ministre, décida la construction de notre école à Athènes. Peu après, sur ma demande appuyée par M. Simon et M. Barthélémy Saint-Hilaire, M. Thiers créa l’école archéologique de Rome; elle lut d’abord une succursale de l’école d’Athènes; elle prospère aujourd’hui dans son indépendance. Dans le même temps, je déblayai l’escalier pélasgique de l’acropole d’Athènes, connu sous le nom d’escalier de Pan, et aussitôt après un nouveau reliquat de 2,000 francs fut employé à Délos, où M. Lebègue, membre de l’école, mit au jour le temple-caverne d’Apollon. C’étaient là sans doute du petites fouilles; elles n’avaient pas remué beaucoup de terre, puisque le déblai revient à tant le mètre cube et que nous n’étions pas riches. Elles n’étaient rien en comparaison de celles