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contient une certaine proportion de gypse dissous et le précipite, aussitôt parvenue à un degré de concentration déterminé, ce fait a servi de base à la supposition que les gypses tertiaires auraient tous une provenance marine. À ce compte, les gypses d’Aix eux-mêmes seraient marins. Pour tenter de le faire admettre, on négligeait les cyclades et les limnées, coquilles exclusivement d’eau douce, pour s’en tenir aux potamides associées aux premières dans les lits intercalés à ceux qui comprennent les gypses. On a été jusqu’à signaler un muge (mugil princeps), en laissant de côté des cyprins (Smerdis, Lebias) nombreux et significatifs. On n’a pas tenu plus de compte des nénuphars, des massettes, des potamots et vallisnéries, toutes plantes palustres et par trop gênantes. En réalité, la circonstance que les gypses dont il est question appartiennent à des formations purement lacustres, distribuées en plusieurs bassins, exclut à elle seule l’idée que les eaux de la mer aient pu intervenir, même accidentellement, dans un phénomène répété sur beaucoup de points et dans des conditions parfaitement identiques. Enfin, les gypses lacustres de Provence, nous l’avons déjà affirmé, sont localisés, c’est-à-dire qu’ils constituent des amas stratifiés dont la puissance s’affaiblit graduellement, à mesure que l’on s’écarte du point où le phénomène se réalisait. En un mot, les gypses tertiaires, latéralement reliés aux sédimens ordinaires, n’ont jamais donné lieu à une assise uniforme, se prolongeant dans l’étendue entière de l’ancien lac. Comment dès lors ne pas admettre une cause endogène, c’est-à-dire venue de l’intérieur et tenant soit à des émissions gazeuses, soit à des sources thermales, de nature à combiner leur action avec celle de la sédimentation normale ? L’esprit se reporte vers les calderas des îles Açores : ce sont des eaux thermales très chaudes, accompagnées de mouvemens éruptifs : elles déposent de la silice et du soufre, et celui-ci se transforme le plus souvent en acide sulfhydrique, puis sulfurique, d’où sortent des productions de gypse.

On a dit en faveur de l’origine exclusivement marine des gypses que ceux des anciens lacs auraient été empruntés par les eaux qui les déposaient à des formations marines antérieures, particulièrement au trias ; mais, dans cette hypothèse, il faudrait encore expliquer la fréquence inusitée de tant de sources, se donnant le mot, pour ainsi dire ; traversant simultanément le trias et venant ensuite déboucher au sein des lacs tertiaires, disséminés sur tant de points, leur apportant à tous des gypses entraînés d’un seul et même niveau géognostique. Ces difficultés et d’autres disparaissent d’elles-mêmes, si l’on veut bien prendre en considération l’ensemble des phénomènes thermiques et thermo-dynamiques spéciaux à la période que nous avons en vue. Ces eaux chaudes, chargées