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rentrée au pouvoir semblait être une garantie pour notre politique. Le gouvernement de l’empereur ne pouvait pas se douter que le ministre qui naguère combattait si énergiquement la révolution, entrerait cette fois dans de secrètes compromissions avec le parti qui affichait la prétention de déchirer la convention de septembre et d’entraîner le gouvernement du roi à Rome.


II. — LA DIPLOMATIE FRANÇAISE EN ITALIE.

Lorsqu’au mois de novembre 1864, les troupes françaises quittèrent, pour la seconde fois, les états pontificaux, tout autorisait à croire qu’elles ne reviendraient jamais. La sécurité du saint-siège paraissait pleinement et définitivement assurée. N’était-elle pas placée sous la solennelle garantie d’un acte international sollicité et sanctionné par le cabinet de Turin ? Le gouvernement du roi, heureux de ne plus voir le drapeau français flotter sur le sol italien, nous prodiguait les témoignages de son contentement ; il les rehaussait par les déclarations les plus rassurantes pour le sort futur de la papauté ; si le problème romain n’était pas résolu, sa solution paraissait du moins pour longtemps écartée. Le gouvernement impérial se flattait de s’être prêté à un acte de haute sagesse. C’était un mirage : les peuples brisent, dès qu’ils le peuvent, les liens qui compriment leurs sentimens et entravent leur expansion. La question romaine devait reparaître menaçante aux heures les plus inopportunes pour la politique de l’empire au moment où la fortune, lasse de ses erreurs et de ses faiblesses, la trahissait de tous côtés.

« Depuis que nos troupes se sont embarquées, écrivait le baron de Malaret, l’idée de Rome capitale a repris un singulier ascendant. Ce n’est pas qu’on veuille aller à Rome, mais cela prouve qu’on se persuade qu’il n’y a plus de danger d’en parler et qu’on ne manquerait pas d’y aller si on était certain qu’il n’y eût pas de danger à le faire. Ces affirmations publiques et presque universelles de doctrines et de principes si contraires aux nôtres sont bien regrettables. Elles persuadent aux Italiens qu’il leur est permis de ne tenir aucun compte des intérêts et des exigences de notre politique, elles donnent du crédit à ceux qui accusent l’empereur d’avoir été ou dupe ou complice des ambitions italiennes en signant la convention du 15 septembre.

« En Italie, ajoutait notre envoyé, à titre de moralité, dans toutes les questions, les opinions dépendent du plus ou moins de sécurité qu’il peut y avoir à les manifester. On peut presque toujours expliquer telle ou telle évolution des chefs parlementaires et des partis par la peur de quelqu’un ou de quelque chose. Depuis que nous avons évacué les étais pontificaux, l’Italie n’a plus peur de