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1722, date du couronnement de Louis XV ; mais, en 1691, il est parlé de deux pierres extraordinaires, l’une connue sous le nom du grand diamant bleu, et l’autre sous celui de diamant de la maison de Guise. Ces deux pièces avaient probablement été achetées, mais nous ne savons pas à quelle date ni dans quelles circonstances[1]. Tous deux semblent avoir été volés en 1792. Le diamant bleu fut cassé en deux morceaux, et il paraîtrait que ces fragmens font actuellement partie de la collection de M. Beresford-Hope, à Londres.

En 1722, Claude Ronde exécuta la fameuse couronne du sacre, dont on voit encore le fac-simile dans la galerie d’Apollon[2].

C’est un peu avant cette époque, en 1717, que le Régent entra dans le trésor ; l’achat en a été raconté par Saint-Simon dans ses Mémoires. On le plaça d’abord au centre du bandeau de la couronne que faisait Rondé. Lors du sacre de Louis XV, cette couronne était surmontée d’une fleur de ils dont la pointe centrale était le Sancy : de nombreux Mazarins, dont le Miroir de Portugal, accompagnaient le Régent sur le bandeau.

Si Louis XIV fit d’importans achats, Louis XV semble, au contraire, s’en être presque entièrement abstenu, et lorsque Louis XVI prit possession de la couronne en 1774, on signalait peu de nouvelles pierres. Toutefois les parures avaient subi des modifications et on peut en suivre les différentes montures dans les Mémoires du duc de Luynes, qui indiquent les bijoux que Marie Leczinska portait dans chaque fête.

Marie-Antoinette se servit naturellement des bijoux de la couronne. Elle affectionnait particulièrement une parure de rubis qui était estimée 145,000 francs.

Un jour, la reine en fit modifier la monture, et pour la rendre beaucoup plus belle, elle y fit ajouter, avec l’agrément du roi, une si grande quantité de diamans précieux, qui lui appartenaient, qu’il devint bientôt impossible de distinguer ce qui était à la couronne de ce qui était à la reine. Aussi obtint-elle du roi que la parure entière lui fût donnée en propre. Mais Louis XVI crut devoir porter l’affaire devant son conseil, et, le 13 mars 1785, intervint un arrêt qui validait cette donation. De plus, comme les montures des bijoux et l’achat de nombreuses pierres avaient donné lieu à de fortes

  1. Un passage des Mémoires de la grande Mademoiselle ferait supposer que le diamant de la maison de Guise aurait été donné par elle.
  2. Rondé (Laurent) avait été reçu en 1689 ; il habitait d’abord quai des Orfèvres, ensuite aux galeries du Louvre. Son poinçon était LR et une étoile. — Son neveu (Claude-Dominique) était associé avec lui et lui succéda comme Joaillier ordinaire du roi et garde des pierreries de la couronne. Son poinçon était CR et un cœur.