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encore catalogués. La commission d’expertise a classé cette pierre, avec quelques autres, dans cette catégorie : « sans importance, pour être envoyée au Muséum. » Depuis, sur l’avis de quelque archéologue (probablement M. Courajod, conservateur au Musée du Louvre, qui a parlé de cette pièce dans le Livre-Journal de Lazare Duvaux), elle a été comprise parmi les pierres destinées à être conservées dans les musées[1].

On voit, par l’exposé qui précède, que l’histoire de ces pierres fut mouvementée. Il est probable qu’il existe encore d’autres pierres aussi intéressantes que la Côte de Bretagne, dont la commission a ignoré l’existence et dont personne n’a cherché à établir l’identité. Mais il nous faut revenir quelque peu en arrière.

Le trésor constitué par François Ier ne subit, sous le règne de Henri II, que quelques modifications. Pendant cette période, Diane de Poitiers avait porté les diamans appartenant au roi. A la mort de ce dernier, elle fut naturellement disgraciée, et François II, à l’instigation de Catherine de Médicis, lui réclama tous ses bijoux : ce fut inutile, car toutes les pièces prêtées à Diane se retrouvèrent au complet dans les cabinets du roi. Pour empêcher désormais les favorites de se parer des pierres superbes que François Ier avait achetées pour son usage personnel, moyennant des sommes considérables, François II, par lettres patentes du 2 juillet 1559, fit entrer dans le trésor de la couronne tous les joyaux dont Henri II et lui avaient successivement hérité. Il n’oublia pas d’y faire figurer en ces termes la fameuse clause d’inaliénabilité : « Laissons, donnons et affectons lesdites bagues, joyaux et autres pierres précieuses, pour y estre et demeurer perpétuellement au trésor, comme les meubles précieux de ladicte maison et couronne de France, sans qu’elles en puissent, pour quelque cause et occasion que ce soient, estre distraictes, vendues ou aultrement aliénées, lesquelles vendition, aliénation et distraction nous avons interdictes et deffendues, interdisons et deffendons par ces dictes présentes. » Parmi ces pièces, les plus célèbres étaient une croix de plusieurs brillans, de 90,000 écus, et une superbe table de diamant, payée par François Ier 65,000 écus : nous les verrons plus tard jouer un rôle historique important.

Après avoir ainsi augmenté le trésor de la couronne, François II fit approprier toutes ces parures au goût du jour pour sa jeune femme. Le roi mourut bientôt, et Catherine de Médicis, devenue

  1. Au sujet de cette pièce, j’ai reçu des lettres émanant de trois membres de la commission d’expertise ; le premier (le président) me déclare qu’il ignore complètement l’existence de la pierre en question. Les deux autres m’informent qu’elle a été classée par eux dans les pièces destinées au Muséum d’histoire naturelle.