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le bras séculier au service des vœux prononcés; elle ne les sanctionna pas et interdit leur perpétuité.

Cette sécularisation à l’égard des personnes, les représentans des classes moyennes la poursuivirent à l’égard des biens Ils re prirent les idées émises par Machault, dès 1769, lorsqu'il proposait l’aliénation d’une partie des biens de l’église. Avec les distinctions déjà établies entre la nature des biens féodaux, les dîmes inféodées avaient été déclarées rachetables. Ces distinctions l’opinion des campagnes ne les accepta pas davantage. La dime, quelle quelle fut même résultant d’un contrat, était odieuse au paysan. Elle cessa d’être perçue, ainsi que les droits casuels

Ce n’était que le premier pas. Le second fut rapidement fait Le cierge sous la monarchie féodale étant un ordre dans l’état avant une personnalité morale, avait pu être propriétaire. La propriété reposait sur les rapports entre la chose et la personne Les légistes de 1789 détruisirent ce rapport fondamental, en dissolvant le clergé comme ordre et en ne reconnaissant plus que des individus, des prêtres, des citoyens. Dès lors ils ne pourront plus acquérir ni posséder qu'individuellement. L’état, disaient Chapeler et Thouret, par droit de déshérence ou d’occupation, recueille la succession des personnes morales qui disparaissent. « Tant que le cierge conservera ses biens, l’ordre du clergé ne sera pas détruit. »

C’était l’idée d’un clergé dépendant du pouvoir civil qui hantait intelligence de ces hommes profondément imbus du souvenir des luttes antiultramontaines des parlemens, luttes soutenues au nom du roi, évêque du dehors. Ils avaient de l’état une notion qui fait comprendre leur système administratif et judiciaire. Appliquée au domaine de la conscience, cette notion ajoutée à de vieilles rancunes assoupies allait leur faire commettre la plus redoutable faute et la moins justifiable contre la liberté. Ils voulurent, on le sait toucher aussi à la discipline et aux formes organiques de l’église de France. Ces bornes, si justement posées par eux, contre le spirituel et le temporel, ils furent les premiers à les renverser

Les quelques jansénistes de l’assemblée avaient conçu l’espoir de faire prévaloir leurs doctrines, et cet espoir se fortifiait dans leur esprit, par l’idée qu'ils se rapprochaient davantage des formes de la primitive église. Avec l’âpreté qui caractérise les minorités long, temps opprimées, ils reconstituèrent entièrement le clergé sur de nouvelles lois, conformèrent les circonscriptions des diocèses à celles établies pour les départemens et essayèrent de soustraire l’église de France a la domination de la cour de Rome. Comme ils exerçaient une influence prépondérante dans le comité ecclésiastique, ils firent présenter par Martineau, un des leurs, le projet de constitution civile du clergé.