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Il est un effet de cette chaleur qui persiste et se manifeste dès la première vue, comme un caractère absolument général des météorites. C’est une croûte noire qui recouvre chacune d’elles en totalité. D’une épaisseur qui n’atteint pas un millimètre, elle est presque toujours mate ; cependant elle est luisante comme un émail sur quelques types particulièrement fusibles, ha haute température que chacun de ces corps a éprouvée, dans son parcours à travers l’atmosphère terrestre, est évidemment la cause de l’écorce noire et frittée dont elles sont revêtues comme d’un vernis, témoignage permanent de la chaleur qui les a enveloppées pendant quelques instans. L’étincelle de la foudre produit aussi sur les roches qu’elle frappe une vitrification, assez fréquemment observable à la surface de celles qui forment le sommet de montagnes isolées telles que le Mont-Blanc et le Pic du Midi de Bigorre. C’est à cause de cette ressemblance que les pierres tombées à Lucé (Sarthe), en 1768, furent considérées comme des fragmens terrestres émaillés par la foudre.

L’incandescence dont on constate ainsi l’effet, après l’avoir reconnue à distance sur l’éblouissant bolide, résulte de la vitesse extrêmement grande avec laquelle ce dernier pénètre dans l’atmosphère. L’air refoulé développe une quantité de chaleur énorme, ni m par le frottement, mais par une compression subite, comme dans l’expérience bien connue du briquet à air qui allume l’amadou. On calcul fondé sur les principes de la théorie mécanique de la chaleur peut en rendre compte. Entourée de gaz incandescens, la masse solide le devient elle-même.

Malheureusement il est très rarement possible de trouver les fragmens que projettent les bolides ; il faut des circonstances tout à fait exceptionnelles, même dans des pays très peuplés, pour qu’on les découvre au milieu des détritus du sol et sous la végétation qui le cache ordinairement. C’est par une illusion que l’observateur croit toujours les voir tomber non loin de lui ; aussi les cherche-t-il vainement. D’ailleurs, selon les probabilités, les trois quarts doivent être engloutis par la mer.

Si on part du chiffre annuel de trois chutes, moyenne de ce qui a été observé en Europe, et qu’on admette que cette portion de la terre ne soit pas particulièrement favorisée, on arriva pour toute la surface du globe à un total de cent-quatre-vingts par an. Mais comme elles doivent rester souvent inaperçues, en portant ce nombre du triple seulement, ce qui fait environ six cents, on reste certainement beaucoup au-dessous de la réalité. C’est donc un phénomène journalier.

On ignore de quelles régions des espaces célestes les