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encore dauphin ? .. Là, d’ailleurs, s’arrête la ressemblance physique qui rattache à leur père ces derniers Valois. François II et Elisabeth de France sont les seuls qui soient à l’image d’Henri II. Sur les autres, c’est Catherine de Médicis qui a mis son empreinte.

Claude, qui fut duchesse de Lorraine, ne laisse aucun doute à cet égard. Elle est tout entière du côté de sa mère, et cette ressemblance s’accuse dès l’enfance. Témoin le beau portrait aux crayons de couleur que possède M. le duc d’Aumale. Est-ce là une œuvre de François Clouet ? Il y a tout lieu de le croire, tant le caractère en est conforme à ce qu’on connaît des dessins de ce maître. On ne peut rien voir de plus délicat et de plus ferme à la fois. Le sentiment de la bouche et des yeux est exquis. Cette enfant, sans être belle, est charmante d’intelligence et de sérénité. Catherine de Médicis se retrouve dans la seconde de ses filles, et elle a droit d’en être fière. — Dans le portrait dessiné de la Bibliothèque nationale, la jeune femme commence à paraître, et elle ne dément aucune des promesses de l’enfant. Est-ce bien là une femme déjà, et n’est-ce pas plutôt encore une enfant ? On ne saurait préciser. Claude de Valois n’avait qu’onze ans quand elle fut mariée à François II de Lorraine, et c’est vers cette époque qu’elle est représentée sur ce portrait. Sa situation l’élève au rang de femme, son âge la maintient à l’état d’enfant. Elle est coiffée de l’escofion enrichi de perles et de pierreries, tel qu’on le portait, en 1558, à la cour d’Henri II. Ses traits sont aimables, mais n’ont rien de la régularité de ceux de François II et de la reine d’Espagne : les yeux sont loin d’avoir la même beauté, le nez n’a pas non plus la même finesse, la bouche est d’un dessin plus heurté et le menton est tout à fait fuyant. On reconnaît la fille de Catherine de Médicis beaucoup plus que celle d’Henri II. L’expression cependant apporte une atténuation notable à cette ressemblance, en modifie l’accent et donne à cette physionomie quelque chose de particulièrement français.

La figure d’Henri III (d’abord duc d’Anjou), le plus Médicis de tous les Valois, est plus complexe et plus difficile à saisir. Les portraits de ce prince sont partout, ses portraits dessinés surtout ; la Bibliothèque nationale en possède à elle seule jusqu’à six. Le connaissons-nous mieux pour cela ? Je ne le crois pas. Ce qu’on peut dire avec une quasi-certitude, c’est que sa mère l’aimait plus que ses autres enfans, parce qu’il était, de tous, celui qui, moralement surtout, lui ressemblait davantage. Nature ondoyante et diverse, indolente et raffinée, paresseuse et débile, vicieuse et molle, caressante et féline, cruelle et irrésolue, mobile et impénétrable, portant en elle la duplicité italienne recouverte du masque de la séduction française, incapable d’énergie pour le bien, capable de résolution seulement pour le mal, aimant les lettres et très doué pour les arts, somme