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compagnie d’Elisabeth d’Autriche, sa femme, qui va nous donner les caractéristiques des portraits véritablement peints par François Clouet.


II

La galerie impériale du Belvédère, à Vienne, possède le portrait en pied de Charles IX, de grandeur naturelle. On fit l’inscription suivante au bas de ce portrait :

CHARLES VIIII
TRESCHRESTIKN ROY DE
F [R] ANCE, EN L’A AGE DE XX
A[NS], PEINCT AU VIF PAR
IANNET, 156 [3]

Cette inscription est écrite par le pinceau même qui a peint le tableau, mais elle a subi quelques altérations : la lettre R du mot F[R]ANCE a été refaite ; les lettres NS du mot A[NS] l’ont été aussi ; enfin, le 3 du millésime 156[3] est également repeint. Dans la restitution de ce chiffre, le restaurateur s’est trompé ; il a cru voir la trace d’un 3, tandis qu’il y avait certainement celle d’un 9. Le roi, en effet, a vingt ans sur ce portrait ; la figure elle-même le démontre, et la partie de l’inscription qui lui donne cet âge n’a subi ni surcharge ni altération. Or, Charles IX étant né en 1550, n’aurait en que treize ans en 1563. En 1569, il était dans sa vingtième année.

La figure se détache sur un fond d’appartement très sombre, dans lequel on ne distingue que deux rideaux verts, dont l’un, celui de droite, tombe verticalement, et dont l’autre, celui de gauche, est relevé par le bas. Charles IX est debout, très naïvement, très véridiquement posé, le corps portant presque également sur les deux jambes, un peu plus cependant sur la gauche que sur la droite. Il serre de la main gauche le pommeau d’or richement ciselé de son épée, et tient son gant de la main droite, appuyée sur le dossier d’un fauteuil de velours rouge garni de broderies d’argent. Tandis que le corps, presque de face, indique un mouvement marqué vers la droite, la tête, tournée en sens inverse, se montre de trois quarts à gauche. Le dessin de cette tête est d’une remarquable précision, et la couleur, partout limpide, ne dissimule rien de la rigueur du trait. Le front, bien construit, est intelligent. Les yeux, qui regardent de côté vers la droite, sont petits et dénotent encore une certaine timidité. On les croirait en défiance devant le spectateur, qui, de son côté, ne se sent pas