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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



30 septembre.

Ce qui sortira dans quatre jours de la grande boîte aux surprises du scrutin prêt à s’ouvrir sur tous les points de la France, nul, certes, ne peut le dire ; nul ne sait le secret qui, pour quatre jours encore, est au fond des urnes. C’est l’indéchiffrable énigme, le grand inconnu pour les habiles, qui croient tout deviner, comme pour les esprits simples, qui ne devinent rien et attendent, pour la France entière, qui va donner son vote, et un peu aussi pour l’Europe, qui suit peut-être, avec un certain intérêt ou une certaine curiosité, cette phase nouvelle de la vie publique de notre pays. Ce serait d’ailleurs, convenons-en, une prétention assez vaine de chercher à saisir un résultat possible dans ces mêlées tourbillonnantes où tout est passablement obscur.

D’abord la première expérience qui va se faire d’un nouveau système électoral, de ce scrutin de liste dont on attendait de si merveilleux effets, cette expérience n’est certainement pas de nature à éclaircir le problème qui s’agite dans le pays, à promettre des résultats bien nets, bien décisifs ; elle est plutôt propre à épaissir la confusion, à embrouiller et à déguiser la vérité des choses. De plus, il n’est point douteux qu’en dehors de cette poignée d’agitateurs qui se démènent de toutes parts, qui étourdissent le public et s’étourdissent eux-mêmes avec leurs programmes et leurs discours, qui passent leur temps à rédiger des listes et à imaginer des candidatures, la masse de l’opinion française reste singulièrement perplexe. Elle est fatiguée, désabusée et défiante, c’est bien visible. Blessée et meurtrie de toutes les expériences auxquelles les partis l’ont soumise, elle sent le mal qui a été fait