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tous les soins qui, dans d’autres pays, pèsent sur la classe inférieure du peuple. Il ne paie point d’impôt direct ; il ne paie point au maître de redevances en argent... Le terme auquel le fermier doit acquitter l’impôt ou la rente ne le presse point, et ne le contraint point à vendre à vil prix... Quant aux travaux journaliers, il les fait lui-même avec sa famille... Dans cette exploitation, le paysan s’intéresse à la propriété comme si elle était à lui, il trouve dans sa métairie toutes les jouissances par lesquelles la libéralité de la nature récompense le travail de l’homme... Son industrie, son économie, le développement de son intelligence, augmentent régulièrement son aisance... Il plante pour que ses enfans recueillent les fruits, etc. » Mais, en insistant sur les bienfaits de cette combinaison en Toscane et dans d’autres pays, Sismondi accusait les mauvais usages qui l’avaient faussée en France et l’avaient empêchée de produire ses effets avantageux. On peut regarder comme une autorité de quelque poids dans la question qui s’agite aujourd’hui l’opinion de ce publiciste, de cet économiste libéral qui ne saurait être accusé d’aucune connivence avec les partis dits réactionnaires. En s’appuyant sur le même fonds de raisons générales, M. de Tourdonnet a vu une preuve de ce qu’offre en quelque sorte de naturel un tel arrangement, dans la persistance d’une institution qui a tenu sa place dans l’agriculture des anciens peuples, et qui en occupait une chez les Romains, à côté du fermage à rente fixe, tant que l’esclavage n’a pas envahi tous les domaines. N’est-il pas curieux de voir un aimable et ingénieux lettré, qui ne laissait pas d’être un administrateur pratique et un propriétaire avisé, Pline le Jeune, y recourir en face d’une sorte de crise de fermage? Las de n’être plus, depuis cinq ans, payé par ses fermiers, il écrit à Paulin qu’il va changer son système et qu’il n’affermera plus en argent, mais en parties de récoltes. Cette lettre semblerait écrite d’hier. On sait comment le métayage échappa, au moyen âge, aux lois du colonat impératif, de la servitude de la glèbe, comment aussi il a gardé longtemps des traces de féodalité; c’est là une sorte de tache originelle aux yeux de ceux que hante outre mesure ce genre de souvenirs. Aujourd’hui le métayage peut se placer sous l’invocation d’une idée chère à la démocratie, celle de l’association du travail et du capital. Nous voudrions même que ce caractère éminent fût entièrement reconnu par les définitions de ce contrat, sur lesquelles la jurisprudence tâtonne un peu. Il serait temps que les jurisconsultes se missent d’accord sur ce point qui peut contribuer à fixer les idées. Les uns, aujourd’hui encore, voient dans le métayage un contrat mixte, qui emprunte ses règles tantôt au louage, tantôt au contrat de société ; d’autres n’y reconnaissent qu’un contrat de louage, et