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constatait les nouveaux progrès de la petite propriété, et concluait à l’égalité numérique des fermiers et des métayers. Depuis lors, les relevés officiels établissent la décroissance constante du métayage par rapport au fermage. Ce n’est pas qu’il soit facile de dégager une constatation parfaitement sûre de la proportion à établir entre les forces respectives de ces deux modes d’exploitation. Le document dont nous allons nous occuper reconnaît lui-même ce défaut de précision sans y remédier suffisamment. Avant de rechercher ce qu’on peut tirer de lumières à cet égard de la statistique, on doit d’abord relever une erreur de calcul qui tendrait à diminuer le nombre réel des métayers existant en France. On trouve encore dans plusieurs parties du territoire des fermiers dits fermiers généraux, qui sous-louent à plusieurs familles de métayers le domaine morcelé à cet effet en plusieurs exploitations. Les recenseurs ont inscrit ces fermiers seuls, au risque d’omettre ainsi une quantité de colons partiaires. Pour se faire d’ailleurs une idée un peu exacte de la proportion du métayage relativement au bail à rente fixe et au faire-valoir direct, le calcul doit porter sur deux élémens fort distincts ; d’une part, sur le nombre des métayers eux-mêmes, de l’autre, sur la quantité des hectares exploités par ce régime d’amodiation. Or, d’après le dénombrement de 1881, nous trouvons, quant au personnel, que la régie directe en France occupe 61 pour 100, ce qui peut faire juger du développement de la petite propriété, laquelle représente l’immense majorité du faire-valoir ; le fermage occupe environ 21 pour 100, et le métayage 18 pour 100. D’autre part, si l’on adopte pour base de calculs l’étendue des exploitations, le fermage occupe, par kilomètre carré de territoire exploité, 35,9 pour 100, le métayage seulement 13,2 ; le reste est livré à la régie des propriétaires. Ce chiffre attribué au métayage risque ou de paraître trop faible, ou bien d’accuser une exagération en sens contraire des statistiques qui datent seulement d’une douzaine d’années. Nous trouvons, en 1872, par exemple, 11,182,000 hectares attribués au métayage, en regard de 9,360,000 attribuées au fermage. Il n’est guère admissible que le métayage ait reculé à ce point dans un si court espace de temps. Il serait désirable que le jour se fît plus complètement, et qu’on évitât aussi d’autres erreurs comme celle qui consiste à inscrire parmi les métayers les domainiers congéables de la Bretagne. Quelque diminuée que soit, au reste, l’importance qui reste au métayage, elle est encore grande, et elle paraîtra l’être davantage si on acquiert la conviction qu’il n’a pas perdu sa vitalité et qu’il est même possible d’en tirer un parti nouveau pour notre agriculture nationale, si nous savons faire ce qui est nécessaire pour atteindre ce but. Or, nous n’avons plus à en faire la remarque : premièrement, il n’est pas