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UN RECENT HISTORIEN
DE
LA REVOLUTION FRANCAISE

On ne saurait, sans imprudence, vouloir dès aujourd’hui porter un jugement décisif sur le grand ouvrage où M. Taine aura mis bientôt douze ou quinze ans de sa laborieuse existence. En effet, nous ne connaissons pas la conclusion de ces Origines de la France contemporaine, et nous l’oserions d’autant moins présumer, que peut-être M. Taine lui-même ignore-t-il encore ce qu’elle sera. Quand il faisait paraître son Ancien Régime, il ne se doutait pas qu’il dût être un jour si sévère à la révolution, puisque enfin, dans le dernier volume de sa Révolution, s’il n’a pas fait précisément l’apologie de l’ancien régime, il ne s’en faut de guère. Mais qui répondra bien, puisque sa Révolution a finalement déçu tant de lecteurs de son Ancien Régime, que son Empire ne prépare pas quelque déception du même genre à la plupart de ceux qui lui savent jusqu’ici tant de gré d’avoir écrit cette Révolution ? — Ce n’est pas une logique ordinaire que celle de M. Taine, et, plus hardie que conséquente, elle s’est toujours réservé jusqu’au bout le secret de ses conclusions.

En attendant de le connaître, et à quelque résultat que doive aboutir M. Taine, les trois volumes qu’il nous a donnés sur la Révolution n’en forment pas moins, et à eux seuls, un tout. Sous la condition donc de n’y rien chercher d’ultérieur, si je puis ainsi dire, à la révolution même, il est sans doute permis de les étudier. C’est ce que je me propose de faire, en examinant pour cela,