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l’église paroissiale et la chaumière de la famille d’Arc ; mais les habitans de la partie méridionale relevant du duché de Bar étaient certainement des serfs ou des hommes de mainmorte des Bourlemont, seigneurs de cette partie de Domremy. Voici ce qu’on lit dans un aveu rendu le 12 février 1398 par Jean de Bourlemont, écuyer, à Robert, duc de Bar : « J’ai et dois avoir la morte main en la ville de Domremy, ban et finage d’icelle, en tout ce que je tiens du fief de mon dit seigneur le duc de Bar. Item, j’ai et dois avoir la justice haute, moyenne et basse sur toutes les choses dessus dites et chacune d’icelles. » A la fin du XIVe siècle, les mainmortables ou serfs des Bourlemont dans la partie barroise de Domremy formaient trente-cinq familles vulgairement appelées « conduits, » et ces conduits étaient soumis à la plupart des redevances et corvées féodales énumérées dans l’aveu et dénombrement de 1398 : — four banal, mesures de froment et d’avoine, droits sur les têtes de bétail, vaches laitières, chevaux d’attelage et brebis, labourage, sarclage, fauchage, fenaison, charrois et moisson, gélines à Pâques, moutons à la Pentecôte, quatre douzaines d’oisons à la Saint-Jean, gélines, cire et poivre à la Saint-Remi, trois florins pour le gras bœuf et un porc gras de trois ans avec une hache pour le tuer et un demi-muid de vin à Noël. — Les seigneurs à qui ces redevances ou corvées étaient dues, habitaient une maison forte située en face du village dans une île formée par deux bras de la Meuse, — dont l’un, le bras oriental, est depuis longtemps comblé, — et que l’on appelait, pour cette raison, la forteresse de l’Ile. Cette forteresse, dont l’emplacement est encore indiqué par la direction d’une rue de Domremy qui a conservé le nom de rue de l’Ile, était pourvue d’un baille ou cour munie d’ouvrages de défense et d’un grand jardin entouré de fossés aussi larges que profonds. Dans le testament dicté par Jean de Bourlemont en 1399, on voit figurer en outre une chapelle desservie par un chapelain, dite la chapelle de l’île de Domremy et placée sous l’invocation de Notre-Dame.

Les habitans de la partie française de Domremy, de cette partie que Jeanne désigne formellement comme son berceau dans un des interrogatoires de Rouen sous le nom de Domremy de Creux, parce qu’elle ne faisait pour ainsi dire qu’un avec cette dernière localité, les habitans de la partie française ne semblent pas avoir été assujettis aux corvées dont il est question ci-dessus ; ils devaient seulement prêter leur concours aux hommes du seigneur pour faucher, faner et charrier ses foins dans la forteresse de l’Ile. Il importe de faire remarquer à cette occasion qu’aucun des aveux et dénombremens signalés jusqu’à ce jour ne fait mention des droits de patronage ou autres que les Bourlemont auraient possédés sur l’église paroissiale ; il en faut conclure que cette église et, par conséquent,