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était celle de Medeni ; l’autre avait amené M. Lowasy, qui était entré aussitôt en pourparlers avec le cheikh; enfin les interrupteurs qui avaient si brusquement dissous la conférence étaient des Beni-Mimoune, ennemis d’Oulid-ou-Rebah et des siens. M. Lowasy, s’étant fait reconnaître du commandant de la marine, fut relâché aussitôt ; sans daigner condescendre à justifier sa conduite, il déclara sommairement qu’il allait demander au gouverneur-général satisfaction de l’outrage fait en sa personne au pouvoir civil. Deux jours après sa fâcheuse aventure, il s’embarqua pour Alger.

Rien ne peut donner une idée de l’embarras du malheureux comte d’Erlon entre le rapport sévère de Duvivier et les réclamations bruyantes de M. Lowasy, d’autant plus que la duplicité du vieux général était connue de tout Alger ; c’était le secret de la comédie. Le blâme était universel ; le général Rapatel ne se cachait pas avec La Moricière d’en avoir dit nettement sa pensée au gouverneur. Celui-ci, cependant, serré de près par M. Lowasy, ne put pas faire autrement que de le soutenir et de laisser entendre, sinon d’avouer explicitement qu’il avait autorisé sa conduite ; il écrivit à Duvivier une lettre de blâme qui se terminait par ces mots : « Au point où en sont les choses, je me vois obligé d’envoyer le colonel Lemercier à Bougie pour continuer ou pour renouer des négociations qui sont d’une très grande importance en ce moment. Je lui donnerai toutes les instructions nécessaires pour tâcher d’arriver le plus promptement possible à ce résultat. » M. Lowasy, naturellement, revenait avec le colonel Lemercier.

Ils eurent, dès leur arrivée, une entrevue avec Oulid-ou-Rebah, sur le lieu même de la conférence interrompue. Le cheikh, infatué de son rôle, voulut bien recevoir les cadeaux de prix que lui envoyait le gouverneur, mais avant toute négociation, il exigeait le départ du lieutenant-colonel Duvivier. Cette lâche concession lui fut faite. Blessé profondément des étranges procédés du gouverneur, Duvivier remit aussitôt le commandement entre les mains du colonel et rentra en France: Le 9 avril, le traité fut conclu. La paix était rétablie entre les Français et les Kabyles. Oulid-ou-Rebah reconnaissait aux premiers le droit d’occuper Bougie et la plaine jusqu’à la rivière ; il accréditait auprès d’eux son consul Medeni. Les Français et lui devaient se prêter un appui mutuel contre les tribus qui voudraient troubler l’ordre. Il est à remarquer que le cheikh des Abd-el-Djebar cédait à la France Bougie, qui ne lui avait jamais appartenu, et stipulait pour des gens dont il n’était pas le chef. Il est vrai que, par une formule ingénieusement prévoyante, l’acte comprend, avec les tribus qui lui obéissent, celles qui lui obéiront par la suite. La suite, au lieu des soumissions attendues, amena