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laisse vivre les marchands de babioles et tous ceux qui exploitent le penchant immodéré de la foule pour ce luxe qu’on appelle avec raison de pacotille, ce ne peut être une raison de les y aider par des théories relâchées et par des excitations factices.

Nous arrivons à un autre point sur lequel il n’est pas moins important de se former une opinion exacte dans un enseignement officiel, je veux dire les « limites » de l’économie politique. On ne cesse de se demander s’il en faut exclure tout travail intellectuel, ou, au contraire, y faire entrer les travaux de tous les genres au même degré et sans distinction. Nous sommes d’avis que les travaux intellectuels n’appartiennent à l’économie politique que par le côté de la rémunération, mais qu’on ne peut, à ce titre du moins, leur refuser l’entrée de la science. C’est ce dont ne paraissent pas tenir suffisamment compte quelques-uns des auteurs que nous avons en vue. Ils déclarent simplement que l’économie politique ne s’occupe que de « faits matériels. » Est-ce très exact dans des termes si absolus? Est-ce que le travail de direction dans les entreprises est un fait « matériel? » Ce qu’on rémunère chez un gérant, n’est-ce pas l’emploi de certaines facultés et non une série d’efforts musculaires ? Les garanties morales qu’on demande à certaines professions n’en augmentent-elles pas de même la rétribution? Est-ce une circonstance d’ordre matériel qui vaut à un caissier d’être mieux payé qu’un maçon? Nous touchons ici, au reste, à un sujet qui prête aux discussions entre économistes et jurisconsultes. Il ne serait pas impossible que, dans ce parti-pris de rejeter même le côté économique de certains travaux d’ordre supérieur à la matière, il entrât un peu de crainte de les voir tous s’impatroniser, sur le même pied, dans les cadres de la science, où les « professions » ne figureraient plus que comme de simples « industries. » C’est là, en effet, une manière d’entendre les limites de l’économie politique qui compte beaucoup de partisans. Elle forme toute une école, et ce n’est pas la première fois qu’elle met en présence les jurisconsultes et les économistes, certains économistes du moins. Je ne puis omettre de citer le principal promoteur de cette dernière théorie qui étend extrêmement les limites de la science économique. Le nom de l’écrivain à qui échut la fortune d’y attacher son nom rappelle plutôt au public qui lit l’histoire de la restauration, les luttes du parti libéral contre ce gouvernement, par la rédaction du journal le Censeur, faite en collaboration avec Charles Comte, que des thèses d’école. Mais ce rôle d’homme de parti n’a empêché ni l’un ni l’autre de s’occuper de savans travaux et de prendre part à des controverses fort différentes de celles qui se renfermaient dans les questions du moment. C’est un succès tout théorique que rechercha M. Charles Dunoyer,