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dire, lui écrivait-il, que le général d’Alger est jaloux de vous, parce que c’est vous qui avez conclu la paix, et ce qui le prouve, c’est qu’il veut écrire au roi des Français pour lui demander de traiter avec l’émir. Il veut faire comme vous ou plutôt défaire ce que vous avez fait ; mais il est impossible qu’il réussisse, car votre conduite est connue de l’orient à l’occident. » Décidé à trouver tout bien et à tout croire de ce qui lui venait d’Abd-el-Kader, le général Desmichels poussa l’infatuation jusqu’à l’aberration d’esprit, ce n’est pas trop dire, car il fit déclarer à l’émir qu’il le rendrait grand bien au-delà de ses plus grands désirs, et que pour le faire régner du Maroc à Tunis, il n’attendait que le prochain départ du général Voirol et l’arrivée de son successeur.


VIII

La commission d’enquête, instituée au mois de juillet 1833, avait eu pour mission de recueillir les élémens d’une réponse aux questions suivantes : 1o  Notre conquête doit-elle être conservée ? 2o  Si l’occupation est avantageuse, quel est le système à suivre ? 3o  Doit-on se borner à la soumission des indigènes ? 4o  Doit-on consolider notre établissement par la colonisation ? 5o  Quelle est l’organisation administrative la plus convenable ? 6o  Quel est enfin l’état général du pays sous les différens rapports ? Après le retour des commissaires enquêteurs, une ordonnance royale du 12 décembre 1833 institua, pour entendre et discuter leurs dires, une commission supérieure composée de dix-neuf membres dont voici les noms : duc Decazes, président ; général Guilleminot, général Bonet, comte d’Haubersart, pairs de France ; La Pinsonnière, Laurence, Piscatory. Reynard, Duchâtel, Dumon, Passy, de Sade, Baude, députés ; général Bernard, vice-amiral de Rosamel, général Montfort ; Volland, intendant militaire ; Duval d’Ailly, capitaine de vaisseau.

Les travaux de la commission supérieure, résumés dans un rapport de son président, aboutirent à ces conclusions : « 1o  l’honneur et l’intérêt de la France commandent de conserver les possessions sur la côte septentrionale de l’Afrique. (Ce paragraphe fut adopté à la majorité de 17 voix contre 2.) 2o  en réservant les droits de la France à la souveraineté de toute la régence d’Alger, il convient de borner, pour le moment, l’occupation militaire aux villes d’Alger et de Bône protégées par des lignes d’avant-postes dont les travaux de fortification pourront être ajournés, ainsi qu’aux villes d’Oran et de Bougie ; 3o  les forces effectives entretenues dans la régence doivent être fixées à 21,000 hommes, qui auront comme auxiliaires des forces indigènes ; 4o  la puissance législative, dans les possessions d’Afrique, devra être déléguée au roi ; 5o  un