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et ils s’y seraient prêtés en effet, si le général ne leur avait pas fait donner la chasse. Le 31, le nombre des assaillans était décuplé ; la fusillade ne dura pas moins de sept heures. Dans la nuit suivante, le marabout de la plage fut entouré de fossés et crénelé. La journée du 1er août fut assez calme ; dans la soirée, toutes les troupes, moins les détachemens qui occupaient les forts et le marabout, reçurent l’ordre de s’installer dans Matmore ; l’entrée de Mostaganem, réservée aux Turcs et à ce qu’il y avait encore d’indigènes, fut interdite aux Français ; la place du Marché, extérieure au rempart, demeura commune aux deux quartiers. Le 2, le général Desmichels, laissant le commandement provisoire au lieutenant-colonel Du Barail, s’embarqua sur la frégate avec son état-major et le kaïd Ibrahim. Cent cinquante Turcs, anciens habitans d’Oran, demandèrent à y rentrer ; ils trouvèrent place sur la flottille. Les autres, au nombre de soixante-dix, eurent la garde de Mostaganem. Le 3, du bord de la frégate contrariée par le vent, on entendit la fusillade et des coups de canon ; quelques heures après, le brick Hussard, venant de Mers-el-Kébir, accosta et fit passer au général des dépêches d’Oran ; elles annonçaient un grand mouvement des Arabes entraînés par Abd-el-Kader vers Mostaganem. Cette fusillade entendue le matin, c’était, en effet, le bruit de son attaque. Elle fut ce jour-là dirigée surtout contre le marabout de la plage, qui eut à soutenir, le 5, un assaut encore plus violent. Mouillé tout près de terre, le brick Hussard lui prêta le secours de son artillerie : les assaillans, balayés par la mitraille, se rejetèrent vers Matmore, tandis que d’autres bandes attaquaient Mostaganem. À défaut de canon, ils essayèrent de la sape. Il y avait beaucoup d’endroits où la courtine était mal flanquée ; avec beaucoup d’intelligence, ils en choisirent un où elle ne l’était pas du tout ; la nuit venue, sous la protection de leurs meilleurs tireurs embusqués dans les plis du terrain parmi les broussailles, des volontaires élus entre les plus braves attaquèrent à coups de pic le pied de la muraille ; tout près d’eux, la musique arabe de l’émir jouait pour les encourager ses airs les plus sauvages. Pour achever le tableau, à cheval sur la crête du mur, exposés à découvert au feu des tireurs abrités, les grenadiers du 66e fusillaient de haut en bas les hardis travailleurs. À minuit, ces audacieux se retirèrent, emportant leurs morts. Le (5, arriva le colonel de Fitzjames, nommé par le général Desmichels commandant supérieur de la place, avec quatre compagnies du 1er bataillon d’Afrique, un renfort d’artillerie, 150,000 cartouches, 500 obus et des vivres. L’ardeur de l’ennemi s’affaiblissait ; ses attaques devenaient plus molles ; après une dernière et vaine tentative contre le marabout, il s’éloigna, le 9 ; son véritable effort avait duré six jours.