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phriers, les canneliers confinent à ceux de l’Inde ou du Japon ; les acacias ou gommiers sont multipliés. Les chênes n’ont que des feuilles petites, dures et entières ; les ormes et les bouleaux sont encore très rares et comparables à des formes maintenant cantonnées dans les parties chaudes de l’Asie orientale. On rencontre des lauriers-rose, des catalpas, des allantes, des bombacées, des gainiers, des jujubiers, probablement encore des composées frutescentes, des dragonniers, même des bananiers, associés à des pins, à des roseaux, à des plantes aquatiques, submergées ou flottantes, qui peuplaient de leur foule les bassins où s’épanchaient des eaux thermales. Cet ensemble, sur lequel nous n’insistons pas, révèle des combinaisons et une physionomie très éloignées de celles que le domaine signalé plus haut nous avait découvertes. Il faut aller maintenant plus loin, dans la direction du sud, ou même explorer les environs du Cap pour retrouver des traits d’analogie. Du reste, le contraste qui naît du rapprochement des deux anciens domaines comparés n’est pas plus prononcé que celui qui résulte sous nos yeux des domaines forestier et méditerranéen, ou de ceux des prairies et du littoral californien, mis en regard l’un de l’autre. Seulement, au lieu d’être juxtaposés, ceux dont nous avons esquissé les caractères se sont substitués l’un à l’autre. Ce n’est pas la première fois que des phénomènes successifs dans le temps se trouvent être les équivalens d’autres phénomènes échelonnés à travers l’espace. L’abaissement de la température terrestre, dans sa marche chronologique, a suivi, au moins d’une façon générale, le même ordre de décroissance que celui dont les latitudes graduées, de l’équateur au pôle, présentent le tableau. Les deux séries, on peut le dire, coïncident sans se confondre, celle que le temps a réalisée ayant de visibles analogies avec celle qui occupe l’espace. Toutes deux nous traduisent, en se complétant l’une par l’autre, l’image fidèle, bien qu’affaiblie, des révolutions d’autrefois, aussitôt que, soit à l’état vivant, soit à l’état fossile, nous interrogeons les flores régionales avec leurs fluctuations, leurs contrastes, leurs épaves et leurs mélanges inévitables, avec leurs espèces dominantes qui subordonnent, sans les éliminer immédiatement, des formes dont la raison d’être demeure inscrite au fond du passé.


IV.


L’étude du phénomène dont nous venons d’exposer le sens et de déterminer la portée facilite singulièrement notre tâche en nous découvrant la nature du processus d’où l’espèce végétale est dérivée, comme un dernier résultat de tout un ensemble d’actions combi-