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rope jusqu’aux Alpes, aux Pyrénées et au Danube, avec la Sibérie presque entière, et, d’autre part, comprend en Amérique la Nouvelle-Angleterre avec le cours du Mississipi, la région des lacs jusqu’à l’Alaska et aux plages du Pacifique. Ici, les deux domaines comparés, l’occidental et l’oriental, sans être entièrement identiques, offrent pourtant d’étroites analogies et se correspondent trait pour trait. Les pluies sont assez abondantes en toutes saisons, d’un bout à l’autre du domaine forestier, pour entretenir de puissantes forêts d’arbres feuillus, dépouillés pendant l’hiver, à la verdure tendre renouvelée d’année en année, tandis que sur les massifs montagneux s’étagent de puissantes associations de conifères au feuillage sombre et persistant : pins, sapins, ifs. L’homme civilisé a tendu d’âge en âge à modifier cet état de choses en substituant ses cultures aux forêts, qu’il a détruites ou amoindries. Il n’en reste pas moins visible partout où cette action n’a pas encore pénétré, et l’histoire est là pour en attester l’ancienne existence.

Au sud du domaine forestier se trouvent échelonnées trois séries de domaines, qui se prolongent parallèlement dans la direction de l’équateur et des mers australes. En Europe, c’est d’abord le domaine méditerranéen, dans lequel les arbres et arbustes à feuillage dur, d’un vert grisâtre ou lustré, étroit et allongé, tels que les yeuses, lauriers, myrtes, filarias, cistes, lentisques, lauriers-rose, romarins, etc., couvrent le sol d’une verdure ordinairement maigre, luxuriante par exception au bord des eaux courantes, sous un ciel presque toujours serein. À ce domaine succède celui du Sahara, presque sans pluies, où la végétation ne forme plus que des îlots épars ou oasis que caractérise la présence du dattier. Puis vient l’Afrique équatoriale ou soudanienne, avec ses baobabs, ses mimosées, et tout ce cortège de dragonniers, de pandanées, de palmiers, de bananiers, qu’entraîne l’influence du soleil des tropiques, sur les points où les pluies ne font pas défaut. Le Cap forme, à l’extrémité du continent, un domaine à part où reparaissent les bruyères, où se montre tout un cortège de protéacées, de térébinthacées, de plantes bulbeuses de types entièrement spéciaux ; mais, entre le domaine du Cap et le Soudan, s’interpose le désert de Kalahari, région presque sans pluies, qui répète le Sahara sur une plus petite échelle, à une latitude et dans des conditions à peu près équivalentes.

Remontons maintenant en Asie : au centre de ce vaste continent, en l’absence d’une mer intérieure dont la Caspienne, l’Aral, plus loin le Baïkal jalonnent l’ancienne direction, entre le pays des Kirghiz et le Golfe-Persique, entre l’Altaï et les crêtes de l’Himalaya, des rives de l’Euphrate aux frontières de la Chine, s’étend le domaine des steppes qui réunit les traits confondus des domaines