Page:Revue des Deux Mondes - 1885 - tome 67.djvu/642

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les autres aliénés sans la permission du bailli, le tout sous peine de 6 florins d’amende. » La même ordonnance exige que les nourriciers catholiques invitent le clergé à s’assurer de l’état intellectuel des aliénés, afin de savoir si les saints sacremens peuvent leur être administrés ; elle invite aussi les nourriciers qui ont des aliénés, à les faire inscrire à leurs noms, afin de payer les frais d’enterrement de ceux qui viendraient à mourir.

En 1754, nouvelle ordonnance constatant que les désordres continuent : les aliénés errent en liberté, si bien qu’il est impossible de distinguer les fous des gens sensés ; les nourriciers en ont peu ou point de soins-, et la liberté laissée aux aliénés expose journellement les habitans « à des affronts, à des tourmens et à des malheurs. » Il y a lieu de sévir : l’ordonnance décide que les nourriciers devront tenir en sûreté « leurs fous et sots, » soit avec des entraves, soit en les enfermant, soit de quelque autre manière ; que les nourriciers paieront tout dommage causé par leurs aliénés ; que les aliénés ne sortiront le matin qu’à partir d’une heure fixe et rentreront le soir à une heure également fixe. Toute contravention à cette dernière règle sera punie d’une amende, sauf le cas où l’on pourra présenter pour excuse le fait que l’aliéné a récupéré ses facultés. Enfin il est défendu aux aliénés de se servir de feu, même pour la pipe, en dehors de la maison de leur nourricière. La majorité des dispositions de cette ordonnance persistent encore aujourd’hui, sauf la première, qui constitue un recul par rapport aux ordonnances précédentes, plus humaines et plus conformes aux préceptes de la science moderne.

En 1790, une ordonnance revient sur la question des méfaits causés par les aliénés ; en effet, on confie à la police municipale le soin d’obvier ou de remédier aux événemens fâcheux qui pourraient être occasionnés par les insensés ou les furieux laissés en liberté et par la divagation des animaux malfaisans et féroces. Voilà les aliénés sur le même pied que les chiens enragés !

En 1838, il y eut un remaniement considérable du règlement de Gheel : on introduit un service médical, mais il n’est pas encore question d’une infirmerie. La haute direction de la colonie appartient à l’autorité communale : l’état n’y touche pas encore. C’est de 1838 que date le début de l’organisation médicale actuelle. Esquirol, qui visita Gheel en 1821, rapporte qu’alors comme aujourd’hui la grande majorité des aliénés envoyés à Gheel étaient reconnus incurables et que les médecins n’étaient appelés par l’autorité qu’en cas de maladie accidentelle. Il en est de même jusqu’en 1838, époque à laquelle la présence d’un médecin aliéniste est reconnue nécessaire.

La loi de juin 1850 déclare enfin qu’un règlement spécial sera