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nord, l’autre du midi : ce sont deux vents inférieurs, réguliers, qu’on nomme alizés. Les points du globe que le soleil frappe verticalement et où ils se rencontrent forment l’anneau d’aspiration. Ces courans se rejoignent en montant, et, comme la colonne de fumée sur un volcan, ils s’étalent, puis, changeant de direction, ils commencent à s’écouler vers le nord et le midi, et poursuivent leur route. De là une circulation continue qui se résume pour notre hémisphère en un premier vent inférieur, boréal, l’alise, et en un second supérieur, austral, surchauffé, le contre-alizé. Permanens, très réguliers au voisinage de l’anneau, ils s’affaiblissent peu à peu en s’éloignant, leur régularité diminue et fait place dans les latitudes élevées à toutes les variabilités atmosphériques qui caractérisent nos climats ; et comme toute circulation est nécessairement fermée, il faut qu’après une excursion plus ou moins longue dans l’atmosphère nord, le contre-alizé retourne au sud. Il est difficile de savoir par quel chemin il y revient et comment la circulation se complète ; on croit pourtant l’avoir deviné, et voici comment les choses peuvent se passer.

J’ai supposé, pour simplifier la question, que la terre est immobile ; en réalité, elle fait un tour en 24 heures, et si un courant d’air parti du nord et dirigé vers le sud arrivait droit à l’équateur, il verrait défiler devant lui tous les points de ce cercle, d’occident en orient, avec une vitesse d’environ 460 mètres par seconde. Mais pour les habitans de cet équateur qui se croient immobiles, ce courant paraîtrait avoir d’orient en occident la même vitesse de 400 mètres à la seconde. Bien qu’en réalité les choses ne se passent pas aussi simplement, il en résulte cependant que l’alizé, qui descend le long des côtes d’Afrique sur la surface de l’Océan-Atlantique, a vers l’ouest une vitesse latérale apparente qui le porte vers l’Amérique équatoriale. C’est alors qu’il se transforme en contre-alizé qui retourne vers le nord, qui perd peu à peu sa vitesse latérale par la même raison qu’il l’avait gagnée, et qui tend à en acquérir une autre vers l’est. Alors il contourne le golfe du Mexique, parcourt l’Amérique du Nord, puis s’infléchissant peu à peu vers l’est, pénètre dans l’Atlantique qu’il traverse en diagonale pour aborder finalement les côtes d’Europe. C’est la marche du Gulf-Stream, des cyclones et de toutes les bourrasques, marche si bien connue qu’on peut nous annoncer leur départ d’Amérique et leur arrivée certaine à une date prévue. Ces courans abordent au nord sur la Norvège, ou sur l’Angleterre et à Calais, ou bien à Brest, ou à Coimbre (collis imbrium), suivant les circonstances locales qui, sans altérer le sens de ces mouvemens, modifient quelque peu leur parcours et leur lieu d’arrivée.