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La ligne frontière entre la France et l’Allemagne ne suit pas exactement la limite des langues. Un bon nombre de localités de langue française ont été annexées au territoire allemand, même dans le département du Haut-Rhin. Partant de Lucelle, du côté de la Suisse, au sud de Belfort, la ligne de démarcation entre les deux langues suit la ligne de partage des eaux entre le bassin du Rhin et celui du Rhône jusqu’à Valdieu, point culminant du canal du Rhône au Rhin. Puis elle monte par le contrefort qui sépare les vallées de Masevaux et de Saint-Nicolas, au sommet de Baerenkopf, confondue avec la frontière, le long du faite des Vosges, au-delà du col de la Schlucht. Le canton de Lapoutroie, celui de Sainte-Marie-aux-Mines presque tout entier, et une grande partie du val de Ville parlent français. Sainte-Marie-aux-Mines, avec ses annexes, compte une population, totale de 11,523 habitans, environ 5,600 individus de langue allemande. Autrefois, les parties de cette commune au nord de la Liépvrette, appartenaient aux ducs de Lorraine, les parties au sud aux comtes de Ribeaupierre. On en a conclu que la rivière sépare la ville et sa population en deux moitiés : l’une allemande, l’autre française. En réalité, les deux langues sont aujourd’hui mêlées à Sainte-Marie-aux-Mines même, sans démarcation nette. A partir de Sieige, dans le canton de Villé, la limite contourne le massif du Champ-du-Feu, pour descendre dans la vallée de la Brusche jusqu’à Wisches, embrassant encore dans le domaine français le canton de Schirmeck tout entier. A la hauteur du Donon, elle franchit le faite des Vosges pour entrer en Lorraine, suivre la ligne de séparation des eaux entre la Zorn et la Sarre jusqu’à Walscheid, atteindre le canal du Rhône au Rhin, près de Sarrebourg et pénétrer dans le département de la Moselle après avoir contourné le canton de Dieuze. Tout le nord de l’Alsace, après le Donon, parle allemand ! A Sarrebourg, la langue française prédomine encore ; mais plusieurs communes sur la rive droite de la Sarre parlent en majorité allemand. Dans la Moselle, l’allemand est la langue usuelle de presque toute la population du cercle de Sarreguemines et de la majeure partie des cercles, de Boulay, et de Forbach. Sauf quelques petites déviations, la ligne de séparation des deux Nied jusqu’à leur confluent sépare également les élémens français et allemand jusqu’à Boulay. En d’autres termes, la limite des langues en Lorraine a pour repères à partir du Donon, jusqu’à la frontière du Luxembourg, Sarrebourg, Faulquemont, Albestrof et Boulay. Dans l’ancien arrondissement de Metz, toute la population indigène est de langue française ; mais à Metz même il y a beaucoup d’immigrés venus un peu de toutes les parties de l’Allemagne pour chercher fortune ou pour remplir des fonctions publiques dans le pays annexé. Nos évaluations sur le nombre respectif des individus parlant français ou par-