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éparses dans la vaste région qui nous occupe, sur les parties basses comme sur les collines, c’est la végétation, seulement un peu plus pauvre, de la grande terre sous la même latitude. On remarque l’absence de cordylines, de pittospores et de metrosideros, et, disent les botanistes, à peine voit-on deux espèces particulières à la contrée. Les plantes les plus caractéristiques, telles que l’euphorbe glauque, le sophora et le phormiumn abondent. Les insectes et arachnides recueillis ont été reconnus pareils à ceux de la Nouvelle-Zélande. L’intéressante mygale maçonne a aussi sa demeure dans les deux régions. Quelques mollusques terrestres et fluviatiles sont regardés comme propres à Chatham ; les plus nombreux sont également communs sur le pays, dont nous avons décrit les forêts superbes. Fait encore bien digne de remarque, les lézards du groupe des Scinques qu’on y rencontre sont des animaux répandus sur les terres néo-zélandaises. Ne faut-il pas rappeler que l’unique poisson de la famille des saumons qui habite l’Océan-Pacifique[1] fréquente les rivières des îles Chatham et de la Nouvelle-Zélande ?

Sur des îles d’une étendue aussi restreinte, il est curieux de voir le nombre relativement assez considérable des oiseaux -et de s’assurer que ce sont presque toutes les mêmes espèces qu’à la contrée Voisine de la péninsule de Banks. Il convient en ce moment de ne pas se préoccuper de celles qu’on peut supposer capables d’un vol assez soutenu pour franchir de vastes espaces. Que le pigeon, l’alouette, le tui exécutent la traversée de la Nouvelle-Zélande aux îles Chatham, il est difficile de le croire. Que la perruche accomplisse un tel voyage, rien n’est moins vraisemblable ; néanmoins, on en contesterait peut-être l’impossibilité. Il ne saurait en être ainsi pour les espèces tout à fait incapables de voler, par exemple pour l’ocydrome, oiseau coureur ayant des ailes rudimentaires ; pour le fameux perroquet nocturne, le strygops, qui reste fatalement attaché au sol, et pour un aptéryx qui n’a pas été détruit avant l’année 1835. La présence d’espèces ne vivant nulle part ailleurs ajoute un extrême intérêt à la faune d’une terre isolée. Il importe donc de considérer qu’un râle très caractérisé est propre à l’île Chatham, de même qu’un oiseau méliphage[2]. Les meilleurs observateurs croient ce dernier bien distinct de l’espèce de la Nouvelle-Zélande, qui en est la plus voisine.

On s’en souvient, le capitaine Cook avait quitté la Nouvelle-Calédonie ; il faisait voile pour le canal de la Reine-Charlotte, son séjour de prédilection. Le 11 Octobre 1770, il y eut à bord vive émotion et joie complète ; à peu près sous le 25e parallèle de

  1. Retropina Richardsoni.
  2. Rallus Dieffenbachii et Anthornis melanocephala, voisin de l’Anthornis melanura, de la Nouvelle-Zélande.