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Avec de telles conditions atmosphériques, on ne s’attend pas à trouver une luxuriante végétation. La flore est pauvre ; cependant, à l’examiner avec attention, on y prend intérêt. De délicates bruyères sont d’un effet charmant ; la belle liliacée aux magnifiques fleurs jaunes qui existe aux îles Auckland et à la Nouvelle-Zélande semble, par son abondance à Campbell, occuper une terre de prédilection. Outre une énorme quantité de mousses et de lichens, William Hooker, dans un espace de temps très court, récolta soixante-six espèces de plantes qui étalaient leurs fleurs ; vingt-huit seulement n’avaient point été rencontrées aux îles Auckland ; trente-quatre, qui avaient été observées sur cet archipel, ne furent point retrouvées à Campbell. La plupart de ces plantes sont caractéristiques des régions antarctiques ; les unes, particulières à l’île ; les autres paraissant originaires de l’Amérique australe. Les monocotylédones forment une plus grande part de la végétation que dans les pays situés au nord, les herbes deviennent plus nombreuses ; les composées dominent par la quantité ; il n’y a pas de conifères, ces arbres, dans le sud de Té-Wabi-Pounamou, ne croissent que dans les régions alpines. En général, les végétaux de Campbell se rapportent à des genres représentés en Europe, par exemple en Angleterre et dans les contrées plus boréales. Beaucoup de plantes, répandues sur l’île au niveau de la mer, se retrouvent à la Nouvelle-Zélande, à la hauteur de 1,500 à 2,000 mètres. La faune est absolument misérable ; sur les rivages, les phoques sont peu nombreux, les otaries plus communes. Un oiseau terrestre se montre par intervalles à Campbell, la fauvette d’Australie[1], dont les apparitions à la Nouvelle Zélande sont même fort irrégulières. Dans les falaises, les oiseaux de mer animent les lieux qui présentent pour les hommes l’image de la désolation. Un seul mollusque terrestre a été découvert par M. Filhol, et, jusqu’ici, il a été impossible de le rapporter à aucune espèce existant soit aux îles Auckland, soit sur les grandes terres. Il en est de même pour une douzaine de petites espèces d’insectes appartenant à des groupes tellement divers qu’on en tire la certitude qu’une faune entomologique, encore importante dans sa pauvreté, existe à Campbell. Une lumière se dégagera lorsqu’on parviendra à distinguer entre les insectes qui sont particuliers à la petite île australe et ceux qui lui sont communs avec les terres voisines.

A près de 9 degrés à l’orient de Campbell, sous une latitude à peine moins haute que le groupe de Lord-Auckland, on rencontre dans un remarquable isolement une petite terre presque inabordable ; c’est l’île de l’Antipode, entourée de quelques îlots[2]. Là,

  1. Zosterops lateralis.
  2. Latitude 49° 42’, longitude orientale 178° 43’.