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particulier de ceux des bureaux de bienfaisance établis dans chaque commune, et dont le budget est accru chaque année, comme en témoignent les statistiques publiées par le ministère de l’intérieur[1]. A côté de la charité officielle et politique, le concours de la charité privée offre d’inépuisables ressources dues à un même sentiment. Inspirée par la foi religieuse, la charité privée a varié à l’infini ses créations et mis ainsi l’administration des départemens et des communes en mesure de satisfaire à tant de besoins. Malheureusement, le mal fait à l’instruction primaire par la passion de la laïcisation sera plus grand encore, lorsqu’il s’agira de charité et d’établissemens destinés à secourir toutes les misères. Déjà, en ce qui concerne l’organisation des bureaux de bienfaisance, deux tendances s’accusent : l’une qui veut les soumettre à l’influence civile, l’autre qui retient autant que possible l’immixtion de l’autorité religieuse. Dans la plupart des communes, aujourd’hui, le curé en est exclu, et avec lui s’en vont la plupart des dons que la foi religieuse y faisait affluer. Ce sera le devoir de la charité laïque d’y subvenir, comme aussi de pourvoir aux dépenses nouvelles que l’introduction de l’élément civil dans les hospices, les hôpitaux, les refuges de tout genre y rend déjà nécessaires.

Il se passe partout ce qui se manifeste à Paris, ce que les travaux de la Revue ont mis en pleine lumière, particulièrement pour cette grande œuvre hospitalière de la bienfaisance. MM. Maxime Du Camp, Othenin d’Haussonville, ont à bien des reprises retracé les œuvres de la charité privée dans notre capitale, qui se flattait, disait-on, d’être la reine du monde pour les progrès de l’intelligence, des lettres, des sciences et des arts ; M. Maxime Du Camp n’hésite pas à dire que le nom sous lequel la postérité devra la saluer sera celui de reine de la charité. Pour continuer d’obtenir d’utiles résultats dans ce sens, il ne faut pas séparer l’exercice de cette charité de ce qui en est le plus puissant appui, le principal instigateur, c’est-à-dire, comme M. Maxime Du Camp le proclame avec autorité, la foi religieuse. Or cette séparation est l’objet principal de la laïcisation de nos hôpitaux et de nos hospices. Déjà on a vu quels effets matériels elle a produits : les révélations les plus poignantes ont été faites sur la substitution des infirmiers et infirmières laïques à nos admirables sœurs de charité ; ce ne sont pas seulement les aptitudes qui manquent aux premiers pour soigner les malades, les infirmes, les fous, etc., d’autres

  1. De 1881 à 1882, les revenus des bureaux de bienfaisance se sont accrus de 224,370 francs. (Rapport de M. Leguay, directeur de l’administration départementale et communale.)