Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 65.djvu/423

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE
BUDGET DEPARTEMENTAL

Le plus grand des maux dont nous puissions souffrir, c’est l’excès des illusions d’abord, puis l’absence de sang-froid quand elles s’évanouissent. Le plus grand des torts de ceux qui nous gouvernent, c’est l’oubli de la prudence et la facilité à croire aux résultats que l’on désire contre toute raison et toute logique. Sacrifier aux chimères la réalité, l’expérience acquise, les calculs les moins réfutables, fermer les yeux aux chiffres les plus éloquens, pour attendre d’un avenir indéterminé la réparation de maux indéniables, telle nous apparaît la manière dont nos finances, en particulier, sont dirigées depuis longtemps. Vers quel abîme penchons-nous ? Le présent s’améliorera-t-il ? . Reviendra-t-on enfin à une conduite plus sage ? Questions redoutables à poser, singulièrement difficiles à résoudre, et que le public en général se refuse à discuter, préférant fuir la lumière et s’endormir dans une quiétude indéfinie qui, pour cesser, exigerait peut-être des résolutions auxquelles il est mal préparé.

Quelle que soit à l’égard de l’avenir qui nous attend l’indifférence ou l’hésitation, une nécessité s’impose : c’est de connaître à fond le présent et de bien établir la situation actuelle. Avant tout, cherchons à voir clair ; sur un point particulier mettons nos comptes en règle ; établissons bien ce que nous devons au comptant et à terme, ce que nous dépensons aujourd’hui et ce que nous dépenserons fatalement demain, puis, sur quelles ressources, dès à présent et dans un prochain avenir, nous pouvons encore compter.