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accomplie par Claude Bernard et contenue dans la découverte des nerfs vaso-moteurs.

Il faut maintenant que le lecteur veuille bien nous suivre quelques momens avec attention au travers de cette mécanique circulatoire. Il est nécessaire de comprendre ce que les physiologistes nous ont appris sur la pression du sang, sur le pouls, et sur les caractères du courant sanguin dans les différens vaisseaux.

L’ensemble des artères, ou arbre artériel, représente une cavité remplie de sang, une sorte de vase ou de sac, de forme arborescente très particulière, très tourmentée, mais, au demeurant, un véritable sac. Ce sac vasculaire est distendu comme si l’on y avait refoulé une quantité de liquide plus grande que celle qui y trouverait naturellement accès. Il est dans la situation d’un ballon de caoutchouc qui, lorsqu’il est gonflé, enferme une quantité d’air incomparablement plus grande que lorsqu’il est à l’état naturel. Mais, pour que l’image soit tout à fait exacte, il faut nous représenter la paroi de ce ballon comme percée d’un grand nombre de petits orifices qui laissent fuir le gaz, de sorte que, pour le maintenir à son état de distension, on devra l’insuffler constamment. Le système des artères réalise ces conditions : à l’une de ses extrémités, il laisse fuir le sang dans les capillaires et les veines, et à l’autre extrémité, le soufflet du cœur, comme une autre Danaïde, le remplit sans relâche, en y refoulant le liquide qui s’en échappe sans cesse. Une sorte de balance s’établit entre ces pertes et ces gains, équilibre perpétuellement rompu et aussitôt rétabli. L’écoulement par les capillaires a lieu d’une manière continue ; le remplissage par la pompe du cœur d’une manière intermittente et comme par à-coups successifs correspondant aux battemens, c’est-à dire aux contractions de cet organe. On conçoit bien alors que si l’on vient à blesser une artère, c’est-à-dire à perforer le sac en quelque point, le liquide jaillira avec une certaine force et sera projeté à une distance plus ou moins grande. La puissance d’effraction diminuera d’ailleurs à mesure que l’on s’éloignera du moment où le cœur s’est dégorgé dans l’artère, jusqu’au moment où il s’y dégorgera de nouveau. De là ces reprises et ces saccades qui se produisent dans le jet de sang qui sort d’une artère. On conçoit également que si l’on dispose sur cette ouverture artérielle un manomètre, c’est-à-dire un appareil capable de mesurer la pression qui s’opposera efficacement à la fuite du sang, l’instrument indiquera des variations périodiques de cette pression correspondant à toutes les circonstances de l’activité du cœur. Dans l’artère du bras, chez l’homme, cette pression artérielle s’élève à 0m,12 de mercure au moment de la