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route est difficile, et elle est très dangereuse en hiver, malgré tous les travaux d’art qu’on y a exécutés : ponts, viaducs, tunnels, galeries, abris contre les avalanches. Tous ces travaux ont coûté 7 millions et demi de francs.

Dans les montagnes du Tyrol, le col du Brenner est l’une des routes les plus anciennes des Alpes. Elle était déjà connue du temps des Romains et mène d’Inspruck à Vérone. Elle a été établie en 1772 par le gouvernement autrichien. Auparavant, il n’y passait que des mulets et des piétons. C’est la moins élevée des routes des Alpes ; elle n’est qu’à 1,362 mètres. Le chemin de fer du Brenner a été ouvert sur cette route par l’Autriche, en 1867, unissant l’Italie à l’Autriche-Hongrie et à l’Allemagne du Sud. C’est l’une des œuvres les plus hardies de notre temps. On y a travaillé quatre ans. Les rampes y atteignent 23 et 25 millièmes, c’est-à-dire 23 et 25 mètres par kilomètre. Il y a vingt-deux tunnels, soixante grands viaducs et ponts. Quelques tunnels sont tournans, tracés en demi-cercle. Les courbes sont très prononcées sur quelques parties de la voie. La longueur du tunnel principal n’est que de 885 mètres, et la longueur totale du chemin de fer, d’Inspruck à Vérone, de 281 kilomètres. Ce chemin était le plus court pour aller d’Allemagne en Italie avant l’ouverture du Gothard.

En 1854, treize ans avant que le chemin de fer du Brenner fût ouvert, celui dit du Semmering, du nom d’un contrefort des Alpes styriennes, et faisant partie de la voie ferrée de Vienne à Trieste, avait été livré à la circulation. Cette voie se relie aussi à Venise, et fait ainsi communiquer l’Autriche-Hongrie avec l’Italie et l’Adriatique. La partie la plus difficile de la voie est la traversée du Semmering, qui commence à 420 mètres d’altitude, à la station de Gloggnitz, à nne distance de 76 kilomètres de Vienne. Les rampes atteignent bien vite 25 et 30 millièmes, et il faut de très puissantes locomotives, d’une disposition particulière, les locomotives Engerth, pour arriver à remonter ces hauteurs. Le chemin de fer est établi le long de rochers abrupts, de précipices vertigineux, et offre une succession de points de vue aussi variés que grandioses, qui font l’admiration des voyageurs. On traverse successivement quinze tunnels, ayant une longueur totale de 4,469 mètres, et autant de viaducs. Le tunnel principal a 1,384 mètres ; on le parcourt en trois minutes. Les 40 kilomètres du chemin de fer du Semmering équivalent à 100 kilomètres en plaine, par suite des difficultés de traction et de la diminution forcée de vitesse qui en résulte. L’entreprise a coûté 37 millions et demi de francs, soit près d’un million par kilomètre.

Il reste à dire un mot d’une dernière route des Alpes, celle de l’Arlberg, qui franchit le col dans le massif du Vorarlberg, lequel