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part. On peut en réaliser d’assez importantes par les modifications à introduire sur bien des points. Ainsi les sections de secrétaires des divers bureaux ont une hiérarchie et des cadres que rien ne justifie. N’ayant jamais à se montrer en corps de troupes, les secrétaires n’ont nul besoin d’être encadrés par des sous-officiers et des brigadiers qui n’ont rien à faire. Il suffirait de les répartir en deux classes, seconds et premiers soldats, pour donner un petit avantage aux plus méritans ; et, comme leur service est fort doux, on trouvera toujours des jeunes gens ayant une bonne plume qui le préféreront à la vie active. On les mettrait en subsistance dans un des corps de la garnison, et il résulterait de cette simplification une économie sensible. Une autre suppression devrait atteindre les musiques de cavalerie et celles des établissemens de l’artillerie, qui prélèvent déjà dans les rangs un grand nombre d’hommes à titre d’élèves et en réclameraient bien davantage si la durée du service devenait moindre. La vie de caserne a souvent besoin d’être égayée, et les musiques des régimens d’infanterie, qui accompagnent toujours la troupe, sont utiles pour procurer quelque distraction aux hommes ; mais la musique équestre n’a rien qui charme l’oreille, elle ne justifie pas la dépense énorme qu’elle nécessite et qui égale celle de deux régimens de cavalerie. Les musiques de l’artillerie ne suivent pas les régimens, elles restent attachées aux établissemens, et les travaux des forges ou des scieries ne favorisent en aucune manière le son des instrumens. C’est une dépense qui profite uniquement aux oisifs des villes, et il n’y a aucune raison de l’imputer au budget de la guerre.

Une autre institution fort coûteuse et qui est loin de rendre les services qu’on en attend, ou ceux mêmes qu’elle rendait autrefois, est celle des enfans de troupe. A l’origine, on voulait venir en aide aux sous-officiers mariés ; et il n’y en a plus. On préparait au métier de soldat un certain nombre de volontaires issus de l’armée ; et cela n’est plus nécessaire. Maintenant, on espère, en réunissant les enfans de troupe dans des écoles, en faire une pépinière de sous-officiers qui resteront au service un temps assez long pour que l’état profite des dépenses qu’il aura faites pour eux : c’est une double illusion. On a cru pouvoir lier ces enfans au service par des contrats signés d’eux ou de leurs parens ; mais la loi, fort sage, ne reconnaît ni les engagemens pécuniaires souscrits par des mineurs, ni ceux dont la réalisation dépend de la volonté d’une autre personne : toutes les promesses de rester plus tard au service ou de payer une certaine somme seraient déclarées nulles par les tribunaux. D’ailleurs, on ne formerait pas ainsi des sous-officiers au courant du service. Le ministère de la guerre est un fort médiocre instituteur et de plus habiles que lui échoueraient devant une tâche