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régions affectées aux corps d’armée frontières sont de véritables provinces militaires qui doivent constituer des unités géographiques et topographiques. C’est donc avec étonnement qu’on voit Dijon et la vallée de la Saône séparés de Besançon pour être réunis à Bourges. Le chef du corps d’armée de Besançon est chargé de surveiller à la fois la trouée de Belfort et le passage du Rhône à Culoz, qui est la défense avancée de Lyon. La partie nord des Alpes est un système bien défini, dont le centre est à Grenoble et non à Lyon, mais on ne peut en séparer la vallée de Barcelonnette, rattachée bien à tort à Marseille et à la ligne du Var. Rien ne justifie de pareilles erreurs, résultant de la volonté préconçue de tout subordonner à l’égalité du nombre des habitans dans chaque région.

S’il importe beaucoup de corriger ces dangereuses anomalies, il importe encore plus d’établir une différence fondamentale entre les régions frontières et celles de l’intérieur. Pour les premières, le commandement du territoire et celui des troupes doivent rester indissolublement réunis, celles-ci devant être nécessairement chargées de défendre celui-là. Pour les autres régions, les commandemens doivent être séparés. Il faut répartir les troupes selon les ressources que présentent le casernement, les récoltes, les voies ferrées qu’elles ont à prendre pour rejoindre la frontière. Il y aurait, croyons-nous, avantage à diminuer le nombre de ces corps d’armée et à les composer en principe de trois divisions d’infanterie. Les corps frontières, dont la tâche est très lourde, se trouveraient ainsi renforcés. Quant aux divisions de l’intérieur, elles ne seraient pas toutes égales. Deux seraient maintenues à peu près complètes, de manière à pouvoir être mises en marche au premier signal, sans attendre l’arrivée des réservistes. Le chef de la troisième, dont les effectifs de paix seraient bien moindres, aurait le commandement du territoire en temps de paix, et dédoublerait ses bataillons de manière à encadrer un grand nombre de réservistes. Chacun de ses régimens formerait une brigade, et on lui affecterait pour cela des officiers de réserve, avec un nombre convenable de sous-officiers pris parmi l’excédent que fourniront toujours les classes de la réserve. Au bout de peu de jours, chacune de ces troisièmes divisions formerait le noyau d’un corps d’armée qui se placerait en seconde ligne. Les garnisons de Paris et de Lyon, au lieu de se composer de quatrièmes bataillons et de divisions empruntées à d’autres corps, seraient formées chacune d’un corps d’armée complet, d’autant mieux préparé qu’il se trouverait toujours groupé. Les ressources importantes que renferment ces villes favoriseraient la prompte formation de nouveaux corps, composés de réservistes ou de territoriaux.

Ces dispositions, dont on ne peut indiquer ici que le principe et