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LA
NATION ARMEE
A PROPOS DE L'OUVRAGE DU BARON VON DER GOLTZ

L’honneur, le salut même d’un pays exigent que toutes ses forces vives puissent à un moment donné se réunir en un seul faisceau : l’armée nationale. A moins d’une impossibilité physique bien constatée, il faut donc que chacun apporte son concours le plus dévoué et se prépare, dès le temps de paix, par une période d’instruction sur la durée et la nature de laquelle l’accord n’a pu s’établir. Tout homme de vingt à quarante ans, d’après les lois militaires en vigueur presque partout en Europe, se tient prêt à répondre au premier appel du ministre de la guerre et à courir du jour au lendemain à la frontière, pour la défendre ou la franchir. C’est la nation armée, ou plutôt la nation toujours en armes, toujours frémissante, exposée aux dangers qui peuvent résulter d’un état constant de surexcitation.

Qu’il y ait là un devoir à remplir et un devoir égal pour tous, cela n’est pas douteux. S’ensuit-il toutefois qu’il doive être rempli de la même manière par tous, et que celle adoptée en ce moment soit la meilleure, la plus conforme à l’intérêt du pays ? Voilà qui est beaucoup moins certain. On assure cependant que l’égalité absolue entre tous les hommes est la loi des sociétés modernes, et que le service militaire obligatoire, égal pour tous, est exigé par les progrès de la civilisation. Depuis 1871, sous l’influence de ces idées,