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commission, M. Foucher de Careil, écrivait, le 24 mai 1878 : « En Italie comme en Allemagne, en Autriche-Hongrie comme en Belgique, l’exploitation par l’état a toujours été plus coûteuse. Nous croyons que, sur ce point, la lumière est faite et que l’enquête de la commission et les tableaux comparatifs que nous devons au ministère des travaux publics ne permettent pas le plus léger doute. » La commission italienne a voulu, à son tour, entrer dans le détail des faits et des chiffres. Elle a pris pour termes de comparaison les résultats de l’exploitation de la Haute-Italie en 1874 et 1875, les deux dernières années de son existence indépendante, et ceux du réseau de l’état belge dans ces deux mêmes années. Par une série de calculs que nous ne saurions reproduire, elle établit que la compagnie italienne a exploité à raison de 55 pour 100 de la recette brute et l’état belge à raison de 66 pour 100. Ainsi, bien que le réseau belge desserve une population plus dense, qu’il ait des parcours moins étendus, des lignes plus productives, que le combustible et le fer soient en Belgique à des prix beaucoup moins élevés qu’en Italie, le gouvernement belge, pour obtenir la même recette, dépensait de 11 à 12 pour 100 de plus que la société de la Haute Italie. Étendant ses recherches aux autres états européens, l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, le Danemark, la Suède et la Norvège, la Suisse, la commission a dressé un tableau duquel il résulte que la moyenne des dépenses d’exploitation est de 61 pour 100 de la recette brute pour les chemins exploités par les gouvernemens et seulement de 52 pour 100 pour les chemins exploités par l’industrie privée. C’est en Prusse que l’écart est le moindre : il est seulement de 6 pour 100, parce que beaucoup de petites lignes, concédées à des compagnies locales, ont à souffrir des détournemens de trafic pratiqués par l’administration des chemins de fer de l’état. Sur cette question des dépenses d’exploitation, le rapport de la commission italienne arrive donc à des conclusions aussi affirmatives que le rapport de la commission sénatoriale française.

Il ne reste donc plus à examiner qu’un seul ordre de considérations : l’intérêt de la défense nationale exige-t-il que l’exploitation des chemins de fer demeure entre les mains de l’état ? On a avancé, à ce propos, que dans la guerre de 1870 la France aurait tiré un meilleur parti de ses chemins de fer s’ils avaient appartenu au gouvernement. Le rapport italien fait observer qu’on a tort de s’en prendre aux compagnies : celles-ci, dit-il, avaient des ligues en parfait état d’entretien, un matériel roulant incomparable, un personnel nombreux, expérimenté et fortement discipliné ; et ce personnel, pendant toute la guerre, n’a cessé de donner des preuves d’intelligence, de courage et de dévoûment ; ce qui a manqué à la