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pas épargné leurs objections aux projets d’assurance universelle et obligatoire avec concours de l’état. Ces objections sont tirées : 1° de l’accroissement d’impôts nécessaire pour constituer l’apport de l’état à la caisse d’assurances ; 2° du renchérissement de la vie causé par l’augmentation de prix où les industriels chercheraient un dédommagement à leur cotisation personnelle. — A la seconde objection on peut répondre : Les travailleurs gagneraient plus en tant qu’assurés qu’ils ne perdraient en tant que consommateurs. Les patrons, d’ailleurs, ont eux-mêmes intérêt à ce que les ouvriers soient dans une situation meilleure ; de plus, ils ont généralement assez d’intentions charitables pour ne pas refuser de contribuer à une organisation intelligente et en somme économique de la fraternité. Quant à l’objection tirée des impôts, elle est plus grave. Elle perd cependant de sa valeur si on songe qu’ici encore l’ouvrier profite plus de l’impôt destiné aux assurances qu’il n’en est grevé. L’objection tombe même tout à fait si on admet la possibilité de ressources nouvelles pour l’état.


En résumé, la conclusion qui nous semble ressortir de cette étude, c’est que l’individualisme absolu et le socialisme sont également faux; qu’il y a dans toute propriété, théoriquement considérée, une part individuelle et une part sociale; que, dans la pratique, l’exacte distribution de ces parts supposerait une mesure absolue de ce qui est dû à chacun selon ses œuvres; qu’une telle justice « distributive » est une chimère, et qu’il faut s’en tenir à des conventions