Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 63.djvu/678

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des fenouils, des molènes, l’incroyable activité d’une foule d’insectes est un spectacle curieux et d’un attrait singulier. A la Nouvelle-Zélande, sur de vastes espaces, on ne perçoit aucun bruit; les insectes, pour la plupart, sont silencieux. Ce n’est qu’en peu d’endroits que se trouvent en quantité les espèces bruyantes; les papillons diurnes sont assez rares.

Tout d’abord, on a la pensée de comparer les insectes de la Nouvelle-Zélande à ceux des terres les moins éloignées, aux espèces de la Tasmanie et du sud de l’Amérique : c’est un autre monde. On n’y voit pas, comme dans la végétation, des espèces américaines ou australiennes, à l’exception de quelques papillons diurnes. A l’égard de la dissémination, entre les végétaux, dont les semences peuvent être apportées de loin, et les animaux, attachés au sol, la différence est énorme. Dans l’étude de l’histoire de la terre, il importe d’en tenir grand compte.

Des insectes de la Nouvelle-Zélande ont une physionomie un peu étrange ; ils se rapportent à des genres ayant une certaine affinité avec des types répandus soit en Australie, soit dans les archipels de l’Océan-Pacifique ; le plus grand nombre appartient à des formes qui ont des représentans dans l’hémisphère boréal. Dans l’ensemble, les insectes et les arachnides trahissent les conditions du climat ; ils ont l’aspect triste de la plupart des espèces de l’Europe centrale. Voici pourtant un petit scarabée qui a l’éclat de l’or et de l’émeraude : le pyronote, fort abondant sur les deux îles ; mais sa taille est exiguë. Au nord principalement, au milieu des forêts, courent sur les plus des capricornes comme il n’en existe nulle part ailleurs ; c’est dans les troncs de ces arbres que vivent les coléoptères aux longues antennes[1]. Au sud, disparaissent les formes les plus remarquables de la famille des capricornes et de la famille des scarabéides. Les charançons et les sombres coléoptères carnassiers prédominent. Les insectes de l’île Stewart et surtout des îles Auckland rappellent la physionomie des espèces de la Scandinavie et de la Laponie. Sur les deux îles, vers la fin de l’été, dans les champs ou dans les prairies, errent de grosses sauterelles vraiment singulières par les proportions énormes de la tête et des mandibules[2]. Les papillons de jour ressemblent à ceux de l’Europe centrale, mais ils sont beaucoup moins variés. On en a observé seulement quatorze espèces; en France, il en existe près d’une centaine. Dans ce chiffre de quatorze espèces on n’en compte pas plus de sept qui soient particulières au pays ; les autres sont venues d’Australie ou des archipels de la Polynésie, sans doute à la faveur

  1. Les genres Prionoplus, Coptomma, Navosoma, etc.
  2. Les espèces du genre Dinacrida.