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mont Egmont, le pic énorme et superbe que le navigateur venant des rivages de l’Australie découvre à longue distance.

De même sur l’île de Te-Wahi-Pounamou, la grande chaîne s’étend dans la direction du nord au sud. En un point s’en détache une branche se portant vers l’est, où le mont Kaikohoura domine toute la côte. A entendre les marins qui ont navigué en ces parages, si l’on passe près des rives par une nuit qu’éclaire la lune, lorsque les sommets apparaissent, se voit dans une atmosphère limpide, au-dessus d’une ceinture de nuages, le blanc manteau de neige de ces pics scintillans, d’un éclat qui tranche violemment sur les masses sombres des montagnes descendant jusqu’à la mer; alors le spectacle est l’un des plus merveilleux que puisse rêver l’imagination humaine. Sa chaîne principale, s’inclinant à l’ouest et s’approchant plus ou moins de la côte, a des cimes qui sont à plus de 3,000 mètres au-dessus du niveau de la mer. Le mont Cook, sur les confins du Canterbury et du Westland, atteint 4,000 mètres. Il est comme le géant des montagnes de la Nouvelle-Zélande. A tel point il dépasse tous les sommets qui l’entourent qu’on le distingue même de la côte orientale. Les artistes de la colonie, où maintenant s’épanouit la civilisation européenne, se plaisent à le choisir pour sujet de leurs tableaux; ses flancs, sillonnés de profonds ravins que forment les torrens qui s’écoulent des glaciers, offrent des oppositions d’ombre et de lumière du plus joli effet. On le compare volontiers au mont Cervin, le fameux Matterhorn du Valais. Il a paru juste d’attribuer à la majestueuse montagne de la Nouvelle-Zélande le nom de l’illustre navigateur qui, le premier, reconnut le pays avec un soin et une habileté dignes d’admiration. Au sud du mont Cook, il existe encore nombre de hautes montagnes couvertes de vastes glaciers. La région, assez facilement abordable en quelques endroits par les lacs des environs d’Otago, a des magnificences qui, chaque année, attirent des visiteurs. Depuis peu, elle a été explorée d’une manière scientifique.

Il n’est pas de contrée au monde mieux arrosée que la Nouvelle-Zélande; de chaque colline descend un ruisseau. On n’en tire pas cependant tout le profit qu’on croirait pouvoir en attendre. Le pays est étroit; les rivières n’ayant pas de longs parcours restent rapides, sans profondeur, et ainsi peu navigables. Dans l’île du Nord, le fleuve Waïkato a une importance exceptionnelle; il porte de petits bateaux à vapeur, mais le fond de sable fin et léger, formé de pierre ponce, se déplace, et des bancs qui, d’un jour à l’autre, surgissent comme au hasard, rendent la pratique pénible. Le Waïkato prend sa source au Tongariro et traverse le lac Taupo. A l’entrée, c’est un étroit et profond canal ; à la sortie, une large rivière parsemée d’îles. La Waïroa, qui se jette dans le havre de Kaïpara,