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maux, plusieurs observations dont l’exactitude peut être contestée, mais qui prouvent l’importance qu’il attachait à ce genre de questions. Ainsi, à l’en croire, « les hommes qui ont un grand front sont plus lents que les autres : ceux qui ont un front petit sont très vifs ; ceux dont le front est large ont des facultés extraordinaires ; ceux dont il est rond sont d’une humeur facile… Quand les sourcils sont droits, c’est le signe d’une grande douceur ; quand ils se courbent vers le nez, c’est un signe de rudesse. Infléchis vers les tempes, ils indiquent un esprit d’imitation moqueuse et de raillerie ; abaissés, ils indiquent un caractère envieux… Quand les coins des paupières sont allongés, c’est le signe d’un caractère mauvais ; quand leur chair est dentelée comme les peignes du côté du nez, cela indique une nature vicieuse. » Enfin des yeux gris sont, paraît-il, le signe d’un très bon caractère.


IV.


L’homme qui a embrassé d’une vue si large et si pénétrante la nature animale, qui a connu et appliqué les procédés essentiels de la méthode zoologique, devait, semble-t-il, aboutir à une excellente classification. En histoire naturelle, la classification est, en effet, le point d’arrivée de la science, ou plutôt elle est la science même, ramassée comme en un tableau. Mais il est remarquable que ce soit précisément là le côté faible d’Aristote. L’idée de grouper les animaux selon un ordre déterminé, exprimant les ressemblances plus ou moins grandes qui les rapprochent, ne paraît pas s’être présentée à lui. Il compare de toutes les façons possibles les animaux, et formule dans des propositions générales le résultat de ces études comparatives ; de là des rapprochemens dont la science contemporaine peut encore faire son profit. Puis d’autres comparaisons, faites à des points de vue différens, le conduisent à d’autres rapprochemens, et tous ces groupes d’importance inégale sont par lui placés sur la même ligne, sans qu’il lui vienne à l’esprit de les subordonner les uns aux autres selon une rigoureuse hiérarchie. De même pour les différences. Elles se tirent tantôt de la manière de vivre des animaux, tantôt de leurs actions, ou encore de leurs caractères, de leurs parties, et le philosophe leur attribue la même valeur. C’est ainsi qu’il distingue des animaux aquatiques et des animaux terrestres, des animaux sociaux et des animaux solitaires, des animaux qui émigrent et des animaux sédentaires, des animaux diurnes et des animaux nocturnes, des animaux privés et des animaux sauvages. Il va sans dire que la même espèce peut de la sorte se retrouver dans plusieurs catégories.

Peut-être faut-il admettre, avec M. Perrier, qu’Aristote n’a pas