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soleil sortit d’un nuage avec une brillante couleur verte ; tout le disque était visible et si affaibli qu’on pouvait le regarder fixement. Le même phénomène fut observé lundi et mardi. D’après les nouvelles que je reçois des autres parties de l’île, le soleil était vert à son lever, puis devenait bleu comme la flamme de soufre, donnant peu de lumière, jusqu’à une élévation de 20 degrés environ.

« HOPKINS. »

La couleur bleue ou verte dont il est ici question est évidemment liée au phénomène qui nous occupe, puisqu’elle se transforme le soir et qu’elle semble prédire le crépuscule rouge. Elle est plus facile à expliquer : elle est due à la vapeur d’eau. Des études spectroscopiques nombreuses, par MM. Michie, Piazzi Smyth, Donnelli, etc., ont montré dans la lumière solaire des lignes noires caractéristiques de la vapeur d’eau, lignes qui annoncent la pluie, qu’on a nommées pour cette raison rainband. Aux conclusions précédentes il faut donc ajouter celle-ci : il y avait avec les poussières, dans les parties supérieures de l’air, une énorme quantité de vapeur d’eau qui devait se condenser par le refroidissement au moment du coucher du soleil et contribuer pour une large part à la formation du stratus qui donna naissance aux lueurs rouges. Ces couleurs étaient donc dues à la fois et à des poussières suspendues et à des vésicules condensées, disséminées aux limites mêmes de l’atmosphère, recevant les rayons solaires longtemps encore après le coucher et les renvoyant jusqu’à nous ; la cause des crépuscules rouges et prolongés nous est ainsi complètement dévoilée.

Je pourrais terminer là cette étude, dont le but est atteint, mais rien ne peut contenter la curiosité scientifique. Ses exigences augmentent en raison des efforts qui tendent à la satisfaire ; une question résolue ne sert qu’à engendrer d’autres problèmes : à peine a-t-on découvert ces envahissemens de l’air par des poussières haut placées, qu’on veut savoir d’où elles venaient ; nous allons tâcher de le dire. Cette fois, nous sortirons de la certitude expérimentale pour entrer dans les possibilités théoriques ; nous en appellerons à l’imagination, puisque l’expérience nous fait défaut.


VI

Un savant astronome italien, M. Tacchini, fort autorisé dans ces matières, vient de publier dans la Nuova Antologia, un article curieux et très bien fait dans lequel il cherche à dépouiller le